Add new comment
L.A Dance Project à la Maison de la danse
Bien avant de devenir le futur nouveau directeur de la danse de l’Opéra de Paris, Benjamin Millepied avait été sollicité par Dominique Hervieu, directrice de la Maison de la Danse et de la Biennale de la Danse de Lyon pour y résider en tant qu’artiste associé. Ce qu’il a accepté avec enthousiasme – il ne faut pas oublier qu’il a fait ses premières gammes de danseur et de chorégraphe au CNSM de Lyon dirigé alors par Philippe Cohen. Et ce programme du L.A. Dance Project (la compagnie que Benjamin a fondé il y a environ un an) a donc été répété et mis au point dans les murs de la « Maison » lyonnaise. Ce deuxième programme donc, du L.A. Dance Project (on avait pu voir le premier à Paris en mai) réunissait Justin Peck, Emanuel Gat et Benjamin Millepied avec Reflections, la seule œuvre à l’affiche qui n’était pas une création.
Justin Peck est un jeune chorégraphe américain – Californien même, pour être précis – récemment promu soliste au New York City Ballet (l’ancien port d’attache de Benjamin Millepied) et premier chorégraphe diplômé du New York Choreographic Insititute, dispositif d’aide à la création mis en place par le NYCB (une conception que Benjamin Millepied aimerait exporter à l’Opéra de Paris). Son Murder Ballads est, sans surprise, typiquement américain, tant il s’inscrit dans une écriture résolument classique post-Forsythe. Classique et non néo classique car il n’ajoute pas de pas et de figures de son cru, post-Forsythe (et de ce fait post post Balanchine et Robbins) parce qu’il pervertit ce vocabulaire par ce qu’il a de plus virtuose : les porte-à-faux hyper rapides, la justesse des positions hypertrophiées jusqu’à déformer les lignes, l’urgence avec laquelle les danseurs s’attrapent les uns les autres… le tout dansé avec une nonchalance toute yankee. Il flotte d’ailleurs comme un parfum de West Side Story dans cette pièce, dans la façon dont le groupe s’assemble et se disperse. Ça ne manque pas de charme mais un peu d’imagination tout de même. Ce que souligne la musique de Bryce Dessner qui tente de sortir de la galaxie rock et du coup compose un faux contemporain un peu banal.
On n’en dira pas de même de Morgan’s last chug d’Emanuel Gat. Brillantissime dans sa construction, comme d’habitude, la pièce traite le groupe comme une matière organique, mouvante, en flux et reflux, creusant les rapports à même le temps. Étrangement musicale, la chorégraphie qui s’affranchit totalement de la Suite française N°1 de J.S. Bach (jouée par Glenn Gould) et des éclats de la Musique funèbre pour la Reine Mary d’Henry Purcell ou des bribes de la Dernière bande de Samuel Beckett (interprétée par Jim Norton), compose une sorte de partition visuelle ajoutant au contrepoint de l’ensemble. Elle souligne la multitude d’allures, agissements et comportements qui tisse une sorte de diaprure où se fondent ensemble le mouvement et le climat sonore. L'inventivité gestuelle d'Emanuel Gat, elle, semble sans limite. À tel point qu'il faudrait voir ses pièces plusieurs fois de suite pour décrypter un vocabulaire en perpétuelle mutation, d'une liberté totale, mais qui pourtant permet de reconnaître sans coup férir la "patte" du chorégraphe.
On ne reviendra pas sur Reflections déjà chroniqué ici. (http://dansercanalhistorique.com/2013/06/09/soiree-l-a-dance-project-benjamin-millepied/)
[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"733","attributes":{"alt":"","class":"media-image","height":"300","typeof":"foaf:Image","width":"450"}}]]
On ajoutera juste que l’on salue cette troupe à petit effectif (sept danseurs) qui tous sont excellents et passent d’un style à l’autre avec une facilité déconcertante.
Agnès Izrine
17 septembre 2013- Maison de la Danse de Lyon et jusqu’au 21 septembre.
Distribution :
The Morgan’s last chug création mondiale en résidence - Chorégraphie, décor, costumes Emanuel Gat
Murder Ballads Création mondiale en résidence - Chorégraphie Justin Peck - Musique Bryce Dessner pour le groupe Eighth Blackbird (Grammy Award Winner) - Lumières Brandon S. Baker
Reflections - Création 2013 - Chorégraphie Benjamin Millepied - Musique originale David Lang - Concept visuel, costumes Barbara Kruger - Lumières Roderick Murray
Danseurs : Aaron Carr, Julia Eichten, Charlie Hoges, Morgan Lugo, Nathan Makolandra, Rachelle Rafailedes, Amanda Wells
En tournée
Pully, (Suisse) Théâtre de l’Octogone 27 septembre 2013 (programme Millepied – Forsythe)
Londres, Sadler's Wells 2 au 4 octobre 2013 (programme Millepied – Forsythe)
Catégories: