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Samulnori & Salpuri : Musique et danse de Corée au Théâtre du Soleil
L’âme coréenne revisite Paris avec un dernier grand spectacle. Danse traditionnelle, musique et chant composent le programme Paris Nanjang 2015 au Théâtre du Soleil, sur le grand plateau mythique qui a vu toutes les créations d’Ariane Mnouchkine.
Les liens entre le Soleil et la troupe Samulnori Hanullim se sont tissés autour du spectacle Tambours sur la digue. Le Samulnori est la vision contemporaine d’un art populaire ancestral. Le Samulnori s’est constituée comme forme d’art musical, vocal et chorégraphique à la fin des années 1970, quand Kim Duk-Soo créa avec trois autres musiciens un groupe qui s’est attelé à préserver ce patrimoine. Il jouit dans son pays d’une popularité extraordinaire, comparable à celle d’une star de la pop, où à celle dont bénéficiait Maurice Béjart en Europe.
Les trois représentations au Théâtre du Soleil (du 17 au 20 décembre) sont composées de Samulnori et de Salpuri, danse traditionnelle coréenne, interprétée par Kim Ri-Haé. En amont du spectacle, les deux ont donné, chacun dans sa discipline, des masterclass à Paris, à ARTA et au CDC Atelier de Paris-Carolyn Carlson.
Danser Canal Historique : Comment et dans quelles circonstances avez-vous crée le Samulnori Hanullim ?
Kim Duk-Soo : Dans les années 1970, la Corée sortait de la guerre et se jetait à corps perdu dans l’industrialisation. Le patrimoine culturel était sacrifié. Nous avons décidé de recréer le Samulnori autour des quatre instruments essentiels de la culture coréenne, à savoir le Janggu (tambour en forme de sablier), le buk (grand tambour), le kaenggwari (petit gong) et le jing (grand gong). Ensemble ils symbolisent la résonance de la nature. Depuis des millénaires, ces instruments accompagnent la vie, les fêtes, les funérailles etc.
DCH : Ces danses masquées et ces chants sont liés au shamanisme et ont joué un rôle important dans les manifestations des étudiants et ouvriers contre les régimes militaires et pour la démocratie dans la Corée du Sud des années 1980.
Kim Duk-Soo : En effet, le Samulnori et le mouvement pour la démocratie ont marché ensemble, dans une relation de symbiose. Le Samulnori dévoile sa facette joyeuse dans des fêtes mais peut aussi conforter et devenir un moyen de résistance dans des situations difficiles sur le plan psychique, social ou politique. Dans tous les cas il est un soutien à la communauté par sa capacité de résistance.
DCH : Madame Kim Ri-Haé, vous allez interpréter des solos de danse Salpuri. Qu’est-ce qui caractérise cette danse ?
Kim Ri-Haé : Elle fait partie du répertoire des danses traditionnelles coréennes. Toutes les musiques et danses traditionnelles coréennes sont des respirations qui évoluent de façon circulaire. Il y a des danses de cour, des danses masquées et des danses folkloriques, dont le Salpuri, transmis de longue date, de génération en génération.
DCH : Quel est le répertoire gestuel du Salpuri ?
Kim Ri-Haé : C’est une danse dont chaque geste est conçu dans l’idée de chasser les mauvais esprits et d’apaiser les âmes des défunts. Cette danse exprime la tristesse ou la joie et elle résonne avec les gestes qui empreignent les corps des Coréens et leur comportement général au quotidien.
DCH : Cette danse incarne donc un esprit de paix, par sa lenteur et par l’esprit d’harmonie qu’elle dégage.
Kim Duk-Soo : Et pourtant, la danse Salpuri peut aussi exprimer la rancœur.
DCH : Vous déclarez votre spectacle comme un Nanjang, autrement dit, une fête populaire.
Kim Duk-Soo : Au sens large, Nanjang signifie le chaos et le cosmos. C’est aussi le lieu de la fête, du passage et de la libération, un endroit où on peut se rendre disponible pour sa propre libération ou celle des autres, où il n’y a pas de séparation entre le spirituel et le festif. Au Nanjang nous devons témoigner respect au ciel et accéder au bien-être, sinon le ciel nous entraînera vers la guerre ou autres désastres.
DCH : Comment se compose le spectacle que vous présentez au Théâtre du Soleil ?
Kim Duk-Soo : Paris est pour nous une ville qui symbolise l’art, la culture et la paix. Mais les attentats du 13 novembre ont durement attaqué cet esprit de paix. C’est pourquoi j’ai ajouté, par les costumes, le décor et la mise en scène, un tableau shamanique d’apaisement par lequel nous allons commencer notre spectacle. Cette première partie est dédiée aux défunts. Les autres parties sont consacrées aux vivants, avec leurs douze tableaux représentant les douze mois, de janvier à décembre, pour signifier que malgré tout il faut continuer à vivre.
Propos recueillis par Thomas Hahn
Paris Nanjang 2015
Spectacle de Samulnori et Salpuri coréen, dans le cadre du Festival de L’imaginaire 2015 et de l’Année France - Corée 2015/16
Théâtre du Soleil, Cartoucherie
vendredi 17 et samedi 18 décembre à 19h30 , dimanche 20 décembre à 15h30
www.theatre-du-soleil.fr/thsol/dans-nos-nefs/article/paris-nanjang-2015-samulnori
www.festivaldelimaginaire.com/evenements/paris-nanjang-2015/
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