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« Y Olé ! » de José Montalvo
José Montalvo donne une lecture intéressante du Sacre du Printemps et se perd sur une plage, en hiver.
Un Sacre ne vient jamais seul, que ce soit avec ou sans élu(e)s. Ici, c'est plutôt sans. Alors que David Linehan fait jaillir de fontaines de danse contemporaine en noir et blanc comme si les danseurs étaient les touches d'un piano (lire notre article), José Montalvo accueille Stravinski par un Y Olé ! haut en couleurs. Les deux se débarrassent de l'intrigue, ce qui est toujours un pari audacieux, tellement le drame du sacrifice est inscrit dans la dramaturgie musicale et ses déchirements. Dans le cas de Montalvo, la démarche peut même être recevable.
Galerie photo : Laurent Philippe
En fait, cette approche très sectionnée du Sacre, où l'élue est remplacée par l'olé, se situe dans l'après-sacrifice, quand la vie jaillit déjà de la terre. L'ambiance reste plutôt dramatique, mais un cerisier inversé pousse imperceptiblement à travers un mur, pour être finalement en fleurs (mais la partie film d'animation est ici plus sobre que d'habitude chez Montalvo). Les danseurs portent les couleurs des tulipes et autres crocus du printemps. Et si Montalvo n'entend pas le Sacre comme les autres, il a de la suite dans les idées.
Galerie photo : Laurent Philippe
Parmi toutes les interprétations qu'on connaît de la partition, l'olé de José s'adresse à la version de Myun Whun Chung, le chef d'orchestre coréen si apprécié à Paris qui donnait, en même temps, son concert d'adieu avec l'Orchestre de Radio France. Sa lecture procède d'un sens de l'harmonie et d'apaisement tout ce qu'il y a de plus asiatique. Personne d'autre ne donne à entendre un Sacre du Printemps aussi fleuri et ensoleillé.
Galerie photo : Laurent Philippe
Ça colle avec un scénario où la communauté a exorcisé ses angoisses et chacun se concentre sur lui-même et son style chorégraphique personnel. Le face public et les solos pullullent. En contrepartie, Montalvo démontre à quel point flamenco et hip hop ne sont en rien étrangers au Sacre, et il ajoute même quelques graines de danse expressionniste.
Galerie photo : Laurent Philippe
En Andalousie comme en banlieue, le courant passe grâce à l'intensité du lien avec le sol. Et ce rapport, même s'il est récent et urbain comme dans le hip hop, a des racines qui savent traverser la pierre, comme le suggère la vidéo qui accompagne cette première partie d'Y Olé!
Galerie photo : Laurent Philippe
Mais ni une hirondelle ni une pluie de fleur ne sacre un printemps et le Sacre de Stravinsky est trop court pour tenir sur quatre saisons. Il le faudrait pourtant, puisque Y Olé ! a une seconde partie, où Montalvo fait neiger sur la plage, où il met une barque sur le plateau et invite tout le monde à chanter ensemble, après avoir dansé chacun pour soi. Son idéal du "tous ensemble!" passe plus que jamais par l'enchaînement de séquences, et par des rencontres danse-musique parfois aussi farfelues qu'une séquence de flamenco dansée sur du swing, ce qui donne un non-lieu chorégraphique absolu.
Galerie photo : Laurent Philippe
Montalvo montre que ses castings sont toujours aussi extraordinaires, chaque interprète étant un(e) virtuose. Mais leurs tableaux s'enchaînent en vain, aucune écriture dramaturgique ne s'en dégage. C'est trop peu. Pire encore, on est aux antipodes de l'ambiance festive que Montalvo dit vouloir évoquer, celle des fêtes organisées par ses parents, réfugiés espagnols sans le sous mais au coeur gros comme ça. Ici, les moyens déployés refroidissent toute idée d'être-ensemble chaleureux. Sauf aux saluts. Trop tard...
Thomas Hahn
Théâtre national de Chailllot, du 17 juin au 3 juillet
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