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Ann Van den Broek : « The Black Piece »

Noir, c’est noir ! Ann Van den Broek, chorégraphe néerlandaise, construit The Black Piece comme une succession d’apparitions, arrachées à l’obscurité. Parfois on entend un rire, des pas qui s’emballent, des objets qui se déplacent. À d’autres moments, ce sont des détails, une chaussure, une chaise, un bout de visage qui s’impriment brièvement sur un écran fantomatique. À chaque fois, les images s’évanouissent, comme happées par un gouffre, ou hantées par leur disparition.

Les danseurs surgissent par bribes, seuls ou en groupe, comme tirés d’un songe qui se poursuit sans nous, ailleurs, dans une autre réalité.

En tout cas, nous voilà plongés dans la nuit  ou une atmosphère interlope, propice aux rêves – ou au cauchemars, au choix – où l’existant est condamné à s’éclipser sans cesse, à passer, à mourir. Du coup, la danse alignée bien face, dans des costumes vaguement punk, ou qui pourraient appartenir à la Famille Adams, comme un chorus line d’un nouveau genre, véhicule sa dose de grotesque dans cette ambiance mortifère à souhait.

Décidément il y a quelque chose de macabre dans cette danse qui s’effiloche ou lutte pour appartenir au monde des vivants. D’ailleurs, leurs déhanchements sexy ressemblent à une danse d’après tout, d’après coup, qui sans cesse flirte avec l’inanité des gestes et des présences, la vacuité de l’existence.

La caméra, quant à elle, continue d’enregistrer des images, genre caméra de surveillance qui rend compte de la fin de l’humanité tandis que la pièce s’enfonce toujours plus profondément dans les ténèbres d’un inconscient aussi sombre que les éclats du plateau.

Alors se déploient par fragments, ou plutôt par fractions, un univers trouble, celui des fantasmes en tout genre, que cette pièce noire échoue à refouler totalement de l’écran de nos illusions.

Photos Maarten Vanden Abeele

The Black Piece finit par dégager un parfum envoûtant, un peu toxique, aussi funeste et sombre qu’une fleur de tubéreuse, aussi précis et envahissant qu’un cérémonial avec une touche d’autodérision qui sauve la pièce d’une sorte de pompe funèbre qui l’aurait, au final, anéantie.

En tout cas, avec son côté « nuit de la déprime », ou black fantasy, la pièce a fait mouche auprès des ados présents dans la salle, ce qui n’est pas une mince performance !

Agnès Izrine

6 mai 2015 - Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis, Nouveau Théâtre - Salle Jean-Pierre Vernant - Montreuil

The Black Piece

Conception, chorégraphie : Ann Van den Broek
Interprétation : Jan Deboom, Louis Combeaud, Ferhat Güneș, Frauke Mariën, Francesca Monti et plus
Caméra live : Thorsten Alofs
Création lumières : Bernie van Velzen
Musique : Arne Van Dongen
Performance vocale : Gregory Frateur enregistré par Nicolas Rombouts (aka Dez Mona)
Scénographie : Ann Van den Broek, Bernie van Velzen
Costumes : Ann Van den Broek
Conseil : Marc Vanrunxt

Coproduction : Ward/waRD (Belgique – Pays-Bas), Korzo Producties (La Haye), Cultuurcentrum Berchem (Anvers)
Soutiens : Performing Art Fund NL, Prins Bernhard Cultuurfonds

Avec le soutien de l’Ambassade du Royaume des Pays-Bas

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