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Brumachon-Lamarche : « Fragments d’olympe »

Avec Fragments d'Olympe, une évocation des divinités et monstres mythologiques, Brumachon-Lamarche mettent la barre un peu plus haute en matière de spectacles tous publics.

Danser la mythologie grecque correspond parfaitement aux directeurs sortants du CCN de Nantes. On peut faire confiance à Claude Brumachon et Benjamin Lamarche pour trouver les résonances chorégraphiques justes face à un univers artistique fort. Ils l’ont prouvé par le passé, en investissant le Musée Bourdelle et le Musée Zadkine, où ils ont révélé, à travers la danse, une mythologie contemporaine.

Galerie photo Jean-Jacques Brumachon

En évoquant les dieux, héros et créatures hybrides des mythes athéniens, ils poursuivent sur le même chemin, jusqu'aux sources du storytelling occidental. Mais, nous le savons bien, le récit mythologique ou l'épopée homérienne dépassent de loin le cadre d'une pièce de danse. Au lieu de raconter une partie de l'Illiade, Claude Brumachon et Benjamin Lamarche ont opté pour un condensé atmosphérique, une mise en jeu des figures de tous bords, divisée en tableaux chorégraphiques.

Pour Fragments d'Olympe, ils abordent ces créatures qui sont définies par leurs particularités physiques: Héros, monstres, divinités. Le corps est au centre de la mythologie: L'œil unique sur le front du Cyclope, la cécité de Tirésias, la beauté de Narcisse, la laideur des Gorgones, le corps hybride du Minotaure, les ailes et serres des Harpies, les serpents sur la tête de la Méduse…

Galerie photo Jean-Jacques Brumachon

S'y ajoutent sur scène d’autres hybridités inévitables, quand il faut représenter Actéon ou un cheval de guerre. Imaginaire et réalité corporelle ne font plus qu'un. Ces créatures-là possèdent une théâtralité intrinsèque, mais leurs atouts corporels posent problème aux metteurs en scène, alors que le danseur porte en lui l'idée-même du dépassement des capacités ordinaires du corps. In fine, Actéon et le Minotaure sont plus intéressants à danser qu'à incarner au théâtre.

Galerie photo Jean-Jacques Brumachon

Voici donc une approche olympienne d'une belle cohérence sur la forme. Mais peut-on traiter par fragments d'un univers qui n'existe que par le récit, et ce dans les dimensions éternelles ? Il n'y a pas d'histoire dans Fragments d'Olympe, plutôt des tableaux expressionnistes qui racontent les grandes émotions, les rencontres, les situations périlleuses, les individus et les groupes, les identités hybrides et les relations entre humains et sur-humains.

Galerie photo Jean-Jacques Brumachon

Paradoxalement, dans Fragments d'Olympe, l'évocation de la grandeur passe par le détail. Les masques de Francis Debeyre et Patrick Smith, les costumes et les rideaux peints par Brumachon (et des danseurs) participent d’une plongée dans le merveilleux, créant des ambiances qui changent presque aussi vite qu'au cinéma. Ce soin du détail s’oppose aux univers visuels appauvris généralement proposés aux jeunes aujourd’hui. Aussi, il est en soi une expérience pour le jeune public et une revendication.

Galerie photo Jean-Jacques Brumachon

Et les adultes ? Ils ne gagnent pas seulement une plongée dans un monde que peu d’entre eux ont vraiment oublié, ils peuvent aussi s'amuser à décrypter dans les gestes, musiques et costumes des références culturelles venues d’ailleurs. Elles nous suggèrent d'une part que les Grecs aussi communiquaient avec d'autres civilisations, et d'autre part à quel point leur héritage est présent jusqu'à aujourd'hui, partout autour de la Méditerranée.

Grâce aux recherches faites, à la richesse du travail visuel et à l’intensité de l'interprétation chorégraphique, cette création s'adresse aux jeunes comme aux moins jeunes. Émerveillement ou décryptage, chacun trouve ici le niveau de lecture qui correspond à sa manière personnelle d'entrer dans l’univers du Minotaure et d’Achille.

Thomas Hahn

Le 9 avril 2015, CCN de Nantes.

Fragments d'Olympe

Chorégraphie : Claude Brumachon
Musique : Christophe Zurfluh
Assistant : Benjamin Lamarche
Répétiteur : Vincent Blanc
Interprètes : Claude Brumachon/Benjamin Lamarche (en
alternance), Steven Chotard, Elisabetta Gareri/Barbara
Sallier-Vasquez (en alternance), Julien Grosvalet, Martin
Mauriès, Arthur Orblin, Valérie Soulard
Création lumières : Olivier Tessier
Costumes : Jacqueline Brochet
Décor - réalisation : Jean-Jacques Brumachon et l’atelier
technique du Grand T (Théâtre de Loire-Atlantique)
Masques : Francis Debeyre et Patrick Smith
Régie générale : Jean-Jacques Brumachon

 

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