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Hana Sakaï et Yasutake Shimaji : « Autrement dit » version 2024

Une création mondiale produite par La Maison de la Culture du Japon retrace la vie et la danse d’un couple d’interprètes exceptionnels.

Hana Sakaï est une Prima ballerina assoluta, véritable icône au Japon, dont on sait à quel point un public fervent pour la danse classique existe. De plus, elle y a fait toute sa carrière, restant une étoile très demandée : 20 ans après avoir quitté le Ballet New National Theater, elle continue d'être sollicitée par nombre de chorégraphes et metteurs en scène.

Yasutake Shimaji débute par le hip-hop avant de rejoindre la Forsythe Company où il est interprète pendant neuf ans. Depuis, il a travaillé à nombre de projets innovants avec un acteur Nô ou un rappeur, sur la scène ou présentant des performances et des installations. Hana et Yasutake se rencontrent en 2010. Quelques années plus tard, ils partagent leur vie et fondent leur compagnie Altneu et croisent leurs deux disciplines : le ballet et la danse contemporaine. Autrement dit (In Other Words) est le fruit de toute cette histoire. Il s’agit d’un spectacle à teneur autobiographique, qui retrace à la fois leur relation, et leurs efforts mutuels pour accorder leurs danses. En effet, au-delà de la simple différence de techniques, c’est de deux visions opposées de l’art chorégraphique comme de la façon de prendre le mouvement qu’il s’agit. Et, de séquences en séquences, c’est ce que mettent en commun, y compris avec les spectateurs, nos deux comparses.

Galerie photos : © Laurent Philippe

Tout commence avec Hana et ses pointes qui danse la variation de Cupidon dans le Don Quichotte de Petipa – la première variation qu’elle a interprétée à 14 ans – sur le rythme que lui dicte Yasutake ; qu’elle reprend avec ses pointes. Lui se lance dans un solo entre claquettes et soft shoes, assez désarticulé mais d’une souplesse extrême. Il essaie ensuite de lui transmettre ses pas les plus simples, mais bien sûr, elle n’y arrive pas, corsetée dans son approche gestuelle par la danse classique et son dos tenu qui lui confère une raideur aussi imparable qu’impeccable, entravant toute tentative d’effusion – au sens physique comme affectif pourrait-on dire. Dans ces figures d’inspiration jazzy, Yasutake est léger comme l’air, malgré une corpulence et un ancrage dans le sol, elle, si fine, semble si lourde ! Il est silencieux comme un chat, elle retombe bruyamment pointes aux pieds. Lui a tout du matou. Élastique, félin et capricieux, retombant sur ses pattes quelle que soit l’audace du mouvement préalable, agile, alerte et captivant. Elle, se moque gentiment d’elle-même en essayant de lui faire danser Coppélia où elle joue la poupée automate à merveille.

Galerie photo © Laurent Philippe

Finalement, ils arrivent peu à peu dans un domaine plus partagé lorsqu’elle enfile un jogging. Lui cesse de la narguer de ses étirements extensibles et vifs appris chez Forsythe et ses bras malléables hérités du hip-hop. Il fait un joli solo plein de tours et de détours, dans lesquels elle finit par se couler. Enfin, les voici réunis dans un pas de deux langoureux quand retentit Fly Me to the Moon, une chanson qui s’appelait à l’origine In Other Words (autrement dit), La pièce, très émotionnelle, s’inspire de leur histoire d’amour, mais aussi de leurs craintes, de leur peur de la séparation, de la mort qui rôde parfois… Il est rare de voir un couple s’exprimer avec autant de sincérité sur scène et Autrement dit nous en donne l’occasion.

Agnès Izrine

Vu le 18 octobre 2024 Maison de la Culture du Japon à Paris, avec le CND Centre national de la danse dans le cadre de Camping, plateforme chorégraphique internationale.

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