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Entretien avec Michèle Murray

Michèle Murray, artiste associée au CCN de Tours dirigé par Thomas Lebrun, crée TIME le 14 juin au festival Tours d’Horizons. Elle nous a livré les premiers éléments de cette création dont la matière est le temps.

DCH : Pouvez-vous nous parler de TIME, votre création pour le festival Tours d’Horizons ?

Michèle Murray : TIME est une création pour sept interprètes de ma compagnie. Au départ, il s’agissait du temps passé ensemble lors d’une représentation, et la pièce devait s’appeler Time together. Par extension, c’est devenu le temps nécessaire pour qu’une pièce advienne, pour instaurer un travail approfondi avec une équipe, puis le temps pour comprendre une œuvre, pour la ressentir. Et puis je trouve que la façon de traiter, d’organiser le temps est presque la signature d’un chorégraphe.

Mais cette première intuition s’est déplacée, car je développe un double axe de création. D’un côté, le théâtre, la boîte noire la plus traditionnelle, frontal, avec un public assis, qui suppose un cadre temporel strict. De l’autre, un travail pour l’espace muséal, avec des spectacles déambulatoires, un public mobile, et les corps des interprètes qui deviennent « corps objets » d’exposition. Et ce qui m’a frappée soudain, c’est la disparité temporelle entre ces deux formes spectaculaires, presque opposées si on y réfléchit. A partir de là, je me suis prise à rêver d’une création qui déploierait en son sein des temporalités hétérogènes. Comment étirer, resserrer, densifier le temps d’une chorégraphie ? Je sortais des créations d’Empire of Flora et Dancefloor, des pièces de foisonnement et de saturation sonore et soudain j’ai à la fois voulu intégrer en une seule pièce ces deux manières d’aborder le temps, et déployer un nouvel univers où le son et le mouvement pouvaient être interrogés autrement, sans masse musicale, sans techno. C’est pourquoi j’ai fait appel à Benjamin Gibert, compositeur et pianiste, car je voulais ordonner le temps entre le son et le silence, et le piano est le son de mon enfance, mon grand-père était pianiste, et je viens d’une famille qui comprend de nombreux musiciens.

DCH : Comment avez-vous rencontré ce compositeur ?

Michèle Murray : C’est la première fois que je travaille avec lui. Il vient de l’électro mais s’intéresse au piano et a donc réalisé toute une partition autour du piano, l’a enrichi de toute la matière sonore de cet instrument, mais s’est autorisé aussi d’autres possibilités, électroniques, entre autres.

DCH : Comment avez-vous travaillé avec les danseurs ?

Michèle Murray : J’ai la chance d’avoir une équipe avec laquelle je travaille depuis longtemps. Nous développons une confiance mutuelle et de ce fait nous pouvons aller loin dans la composition grâce à leurs propositions. Ils sont très autonomes. Nous avons écrit à partir de deux de mes œuvres précédentes, DUOS / COLLISIONS ET COMBUSTIONS et EMPIRE OF FLORA, la première pour l’espace muséal, la deuxième pour la scène. Donc nous sommes partis de ce matériau chorégraphique pour réinventer des motifs chorégraphiques capables de faire coexister des temporalités plurielles, en distordant ou accélérant certaines séquences, par exemple. Et à l’aide de l’écriture instantanée, qui permet aux interprètes une grande liberté tout en étant encadrés par des règles plutôt strictes au niveau spatial, temporel et relationnel, nous avons construit TIME. Mais j’ai peut-être moins utilisé ce type de composition que lors de mes précédentes pièces. Parce que je voulais voir précisément certains éléments dans ma chorégraphie, et c’est, dans ce cas, impossible si ce n’est pas pré-écrit. Et pour moi, il n’y a pas de méthode qui serait plus intéressante ou meilleure qu’une autre.

DCH : Qu’avez-vous prévu pour la scénographie ?

Michèle Murray : Ce ne sont que des lumières, comme à mon habitude, mais je crois avoir trouvé une idée encore différente. Elle a justement une sorte de temporalité à l’intérieur de la pièce, et les costumes sont près du corps ce sont toujours des t-shirts et des jeans qui dessinent les lignes du mouvement. Il est vrai que j’aime voir les corps – je suis issue de la danse classique – et selon moi, la danse n’a besoin de rien de superflu, d’autant que mes chorégraphies sont très physiques, donc il faut pouvoir se mouvoir. Si j’avais les moyens de rencontrer un grand couturier qui inventerait des costumes hypersophistiqués, peut-être… Mais ce n’est pas certain.

DCH : Vous êtes également artiste associée au CCN de Tours, quelle a été votre réaction quand Thomas Lebrun vous a sollicitée ?

Michèle Murray : Je suis très heureuse d’avoir été choisie par Thomas Lebrun comme artiste associée. J’ai été surprise, car nous nous connaissions peu, mais il suivait mon travail, ce que j’ignorais. Il m’a fait confiance. Et je tiens à le remercier, car c’est une chance.

Propos recueillis par Agnès Izrine

TIME de Michèle Murray les 14 et 15 juin à 20h. CCNT dans le cadre du festival Tours d’Horizons.

À suivre dans Danser Canal Historique la création mondiale de DANCEFLOOR pour le Ballet de Lorraine à Montpellier Danse, les 2 et 3 juillet 2024 à l'Agora de la danse.

 

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