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Daniele Albanese crée « VON » aux Hivernales
VON est un trio, divisé pour mieux parler d’union et d’unité, aux ambiances mythologiques et porté par trois interprètes hors pair.
Daniele Albanese, dont la compagnie Stalker est implantée dans la région italienne d’Emilia Romagna, s’est formé en tant que chorégraphe au European Dance Development Center d’Arnhem, où il a eu comme professeure Eva Karczag, grande figure de la compagnie de Trisha Brown. Les Hivernales ont offert aux deux de belles retrouvailles, car Karczag était sur scène dans la création Yes No Maybe too ( lire notre critique ).
Trio intergénérationnel, VON voit se succéder des solos d’Albanese et des duos dansés par Marta Ciappina et Giulio Petrucci. Pour tous, l’ambiance est nocturne, mythologique et donc propice à ce qu’on se laisse prendre au jeu. Quel jeu? Ballet des planètes ou des particules élémentaires, de puissances supérieures divines ou physiques? Tout à la fois, et même plus, si l’on s’en remet au texte, dit en off par le comédien Giulio Santolini.
Dans leur gestuelle précise et tranchante, mais néanmoins très humaine, Ciappina et Petrucci représenteraient ainsi deux instants en train de s’apprivoiser pour se fondre en un seul, au-delà des lois de la physique et de leurs possibles dont nous avons connaissance.
Et puis, on entend une autre voix, celle de Martin Luther King: « This is the time where we must come together »: Le temps est venu de nous réunir, d’oublier nos divisions. L’idée de deux instants se fondant en un seul, peut-il s’appliquer à l’histoire de l’homme? Au-delà de ses ambiances, VON est une pièce subtilement philosophique et politique.
Sur leurs lignes droites, spirales ou courbes, les deux apprentis en maître-de-l’univers s’approchent de l’art de la trajectoire qu’une De Keersmaeker a su porter à des sommets, alors que, dans son solo final, Albanese montre toute sa puissance évocatrice. Son corps semble se transformer en une sorte de matière originelle, dont l’énergie rappelle le protoplasme filmé par Tarkovski pour Solaris.
Seul dans l’univers, Albanese fait osciller son corps et jette ses bras avec puissance et fluidité, comme s’il était en train de créer le monde à partir de sa propre chair. Mais toutes ces métaphores ne seraient qu’une collection de vanités, s’il n’y avait la qualité brillamment vivante de l’interprétation, par un trio aux inspirants contrastes des âges et des énergies.
Thomas Hahn
Spectacle créé au CDC - Les Hivernales, le 24 février 2017, 39e édition des Hivernales
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