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« Cultes » film de (LA)HORDE

Rendez-vous sur notre nouvelle plateforme de films de danse. Une autre manière de découvrir la danse !

Notre plateforme s’emploiera à mettre en valeur des films et vidéos consacrés à la danse, des captations de pièces chorégraphiques, mais aussi et surtout des œuvres par elles-mêmes, tous genres confondus – documentaire, expérimental, film d’art, etc. – présentant un intérêt particulier et ayant une incontestable valeur artistique.

Dès lundi 22 novembre à midi et pendant une semaine non-stop, vous pourrez visionner Cultes de (LA)HORDE !

Nous avons découvert les films du collectif (LA)HORDE au Majestic Passy, la seule salle de ciné désormais du 16arrondissement, quartier déshérité depuis le déménagement de la Cinémathèque Française du côté de Bercy, dans le cadre du festival Ciné corps de Virginie Combet (lire notre article). Le film Cultes, avec un « s », est un court métrage coréalisé par Marine Brutti, Jonathan Debrouwer et Arthur Harel dans le cadre et en marge du festival estival belfortain des Eurockéennes.

Woodstock à Malsaucy

La première séquence du film est autonome, un opus expérimental en soi, moment de calme tourné avant ou après la tempête, un doldrum, serions-nous tenté de dire. Les plans pourraient être rapprochés de ceux d’un documentaire ethnographique sans dialogue ni voix off sur un rituel d’immersion non encore connu. La cérémonie en l’occurrence est nocturne, saisie à l’aube ou au crépuscule. Quatre des cinq personnages principaux du film sortent tour à tour la tête de l’eau dans l’immensité d’un lac de montagne. 

Les protagonistes, incarnés par Achraf Jendane Bouzefour, Benjamin Bertrand, Daphné Biiga Nwanak, Delphine Rafferty et Sophie Maria Ammann, sont éclairés en contrejour par un rais de lumière solaire. Le rite auquel ils se livrent semble archaïque, laïque ou profane plus que religieux. Certainement plus doux que celui pratiqué dans quelques villages de pêcheurs du Portugal où des veuves se chargent de jeter dans les vagues de l’océan des enfants en bas âge prédestinés au métier de marin. Ici, la jeune officiante qui plonge et remonte la tête de l’eau de ses compagnons vise, dirait-on, à les purifier. Il est des baptêmes de l’eau comme il en existe du feu et, bien entendu, de l’air.

Lendemain de fête

Sans transition aucune, sur la même musique planante de la B.O, Édouard Mailaender, le monteur du film, passe à un plan diurne, céleste, présentant un tourbillon d’objets et de matières multicolores. Un pano vertical fait entrevoir un village de tentes. L’index accusateur d’un bras émergeant de la surface de l’eau annonce le procès à venir. Un travelling en plongée détaille les résidus des quatre jours festifs : les godets et les bouteilles d’eau gazeuse en matière plastique, les briquets vidés de leur gaz ou oubliés sur place, les cannettes de bière ou de soda écrasées au sol, les sachets, les gourdes gonflables, les masques déchirés de Guy Fawkes (alias Anonymous), les lunettes de soleil aux verres crevés, les toiles et les bâches souillées de fange.

Le ramassage de ces reliefs par de petites mains gantées, la patiente collecte de déchets, le vidage de bouteilles de coca, le nettoyage, le ratissage et la remise en état des lieux par une pelleteuse municipale… Au milieu de tout cela, certains raveurs de l’after rêvent, prolongent leur nuit allongés dans la gadoue, à moitié plongés parmi les roseaux, comme si de rien n’était ou n’avait été. On retrouve notre club des cinq disséminé aux quatre coins de ce paysage désolé. On découvre par la même occase les stands de marchands du temple dont les articles ont produit ces vestiges : la tente sang et or du vendeur de churros, celles du kebab des terroirs, de la tartiflette au drapeau savoyard, le food truck Pico del Gallo… Un flash-back remonte à l’installation des échafaudages scéniques et au repas des fêtards présentés comme guerriers sans cause.

Hors champ

Des concerts eux-mêmes, nous n’en saurons rien, le film se focalisant sur l’avant et l’après, sur les a-côtés, sur les spectateurs et non les acteurs. À cet égard, les acteurs et danseurs distribués par (LA)HORDE se limitent dans le cas qui nous occupe à faire de la figuration, à se fondre, autant que faire se peut, dans la foule de jeunes gens et jeunes filles composant le public. La fille aux cheveux peroxydés, debout sur un canot pneumatique, est portée en triomphe par le flot humain pris en vue aérienne. D’ailleurs, cette année-là, en 2018, apparemment, la Patrouille de France avait survolé le site d’un festival à l’issue duquel un feu d’artifice avait été tiré.  

Le film débute comme un documentaire sur le Stonehenge free festival, se poursuit comme un reportage des coulisses façon Monterey Pop (1968)de D.A. Pennebaker et s’achève en brisant toute illusion du spectacle, comme les séquences de pluie et de boue du long métrage Woodstock (1970) de Michael Wadleigh. Dans cette bande teintée de théâtralité, l’esthétique, domaine où (LA)HORDE n’a plus rien à prouver, laisse place à l’éthique. Tout, depuis Beaumarchais, devant finir par des chansons, les auteurs ont opté pour le tube des Newseekers de 1971, I’d Like to Teach the World to Sing, qui servit d’hymne à Coca-Cola.

Nicolas Villodre

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