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Robyn Orlin et Albert Ibokwe Khoza
Ne demandez pas combien de kilos pèse Albert Ibokwe Khoza. Il pèse, dans le paysage artistique. Ou bien il va peser. Son humour, sa présence, son extravagance, sa voix, sa gestuelle, sa liberté, son courage pourront faire de lui une sorte de Steven Cohen noir. Et Robyn Orlin aura été sa metteuse en orbite, même si Khoza a déjà créé plusieurs pièces de théâtre ou de danse, et que sa dernière création, Influences of a Closet Chant, a été présentée en France, et notamment à Montpellier.
C’est lui qui a approché Orlin, dont il étudiait le travail à l’université. And so you see... our honorable blue sky and ever enduring sun... can only be consumed slice by slice…(1) est le fruit de leur rencontre. Face à ce corps plantureux, aussi féminin que masculin, à l’image d’une sculpture de Botero, face à l’exubérance de l’énergie performative de ce danseur, acteur et chanteur dévastateur, Orlin adopte le bon réflexe : Celui de la sobriété.
Même l’usage de la vidéo est ici, paradoxalement, modéré, alors que le corps et le visage de Khosa apparaissent en permanence sur un écran de fond à la démesure des sept péchés capitaux qui constituent une trame de fond, un Leitmotiv sous-jacent. L’orgueil est celui d’un dictateur vaniteux, l’avarice celle d’un gourmand qui donne à sa mastication d’oranges pressées de ses propres mains un goût de luxure. Jalousie, avarice et paresse ne font qu’une.
Film réalisé par Eric Legay pour Danser Canal Historique
Robyn Orlin - And so you see me from despasdesfigures on Vimeo.
Orlin dit vouloir « coloniser Mozart » et faire de son Requiem un chant pour l’humanité. Mais il l’est déjà. Le pied de nez de So you see... consiste à « coloniser » l’image inconsciente de la position de pouvoir de l’Europe vis-à-vis de l’Afrique, qui continue de résonner dans la figure de la Vénus Hottentote, Saartjie Baartman.
Khosa prend le pouvoir en exhibant son corps et appelle sur scène deux spectateurs (choisis – et donc colonisés - explicitement, avec une autorité certaine) pour laver le corps de Khosa: Les bras, les jambes, et plus encore... Son « Je ne suis pas encore propre ! » ironise sur l’obsession de blanchir sa peau qui continue de faire des ravages dans certaines communautés noires et retourne les attitudes des colonisateurs vis-à-vis de leurs domestiques. Mais la bête de foire qu’il campe est d’une complexité et d’une finesse extraordinaires.
"And so you see..." - Galerie photo © Jérome Seron
Tout se dit ici de façon tellement ludique et naturelle qu’on doit espérer que ce ne soit pas la dernière collaboration entre Khosa et Orlin, qui a trouvé ici un artiste complice parfait. Car s’il est vrai que ce solo révèle Khosa, il est vrai aussi que ce performer hors pair permet à Orlin de donner le meilleur de son art, plaçant chaque geste artistique de façon aussi précise que jouissive .
Thomas Hahn
*Et donc voilà… Notre ciel bleu et honorable et notre soleil éternel... Ne peuvent être consommés que tranche par tranche...
Création mondiale au festival Montpellier Danse
Le 1er et le 2 juillet à 20H
Tournée :
31 octobre-12 novembre Théâtre de la Bastille, Paris
15-19 novembre ADC Genève
17-18 mars L Germe du Buisson, Noisiel
21-22 mars CDN Rouen
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