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San Francisco Ballet : Soirée de gala

Comme de coutume, les Etés de la Danse débutent toujours leur série de spectacles avec un gala d'ouverture, qui permet économiquement de contribuer au financement de la tournée et artistiquement, d'avoir un panorama très intéressant sur la nature de la compagnie invitée, son style intrinsèque, et la qualité de ses danseurs. Le gala de ce jeudi 10 juillet 2014 a montré un San Francisco Ballet de très haute tenue, avec un programme riche bien qu'un peu répétitif.

 

 

Le rideau se lève, un danseur accourt dans un grand saut, un autre le suit, et d'emblée, on comprend que l'on a bien affaire à une compagnie américaine. Pourtant, le premier danseur en scène est cubain (Taras Domitro), le second est français (Pascal Molat) et le chorégraphe est italien (Renato Zanella). Mais il y a un fluide, une énergie contagieuse, un style qui est l'apanage , allez savoir pourquoi, des grandes compagnies américaines. La suite du gala d'ouverture, avec ses onze ballets différents permettant une bonne exposition de ce que le Ballet va offrir aux Parisiens, sera de la même veine : de l'énergie, toujours de l'énergie.

 

 

 

Avec trois œuvres de Balanchine et les autres signées de huit chorégraphes différents, tous du XXe siècle, le gala du San Francisco Ballet qui mettait à contribution ses 20 "principals" résume très bien ce qui fait l'ADN de la compagnie la plus ancienne des États-Unis (elle fût crée en 1933), dirigée depuis 1985 par Helgi Thomasson : là-bas, au bord du Pacifique, on y danse avant tout des ballets courts,   signés d'une trentaine de chorégraphes différents, sur pointes pour les filles, dans un style néo-classique, et sur des musiques du grand répertoire. C'est ce qui fera d'ailleurs la force et la faiblesse de cette très riche soirée : la qualité chorégraphique de ces pas de deux, trios et ensembles est indéniable, mais finalement assez redondante.

 

Dans le fond, ces neuf chorégraphes programmés, de Balanchine à Renato Zanella en passant par les Anglais Christopher Wheeldon, Frederick Ashton et Kenneth Mac Millan, l'Islandais Helgi Tomasson, le russe Yuri Possokhov, l'italien Renato Zanella, le danois Johan Kobborg, parlent tous la même langue : celle du ballet classique abstrait, vif, gai, efficace, rassembleur, et sans autre souci que la beauté du mouvement et sa musicalité Et pour traduire ce langage commun, leurs interprètes sont extrêmement cosmopolites. Ainsi, sur les 20 "principals" du San Francisco Ballet, seuls deux sont américaines. Les 18 autres viennent des quatre continents, avec notamment quatre Cubains, trois Français (Pascal Molat, Sofiane Sylve et Mathilde Froustey) et deux Russes (dont la soliste star Maria Kochetkova) . Tous ont appris la danse dans leurs pays respectifs malgré l'existence d'une école au sein du Ballet, et pourtant l'unité du répertoire de cette compagnie, son leadership et les choix de son directeur , en place de puis 30 ans, ont crée un style bien à elle.

 

 

De ces onze œuvres, on a particulièrement aimé Les lutins du danois Johan Kobborg, grand interprète de Bournonville avant de rejoindre le Royal Ballet de Londres. Ce trio de danseurs narguant un pianiste et son violoniste est pétillant, très inspiré d'ailleurs de la gaîté bournonvillienne, et formidablement bien servi par Dores André, Esteban Hernandez et Gennadi Nedvigin. Dans la même veine, Alles Walzer de Renato Zanella sur une valse de Strauss, avec ses deux gogo dancers (Pascal Molat et Taras Domitro, la révélation du Ballet de Cuba lors de sa venue avec les Etés de la Danse en 2007, ayant fait défection l'année suivante pour rester aux États-Unis) rivalisent de prouesses réjouissantes.

Le même Strauss sera illustré fort différemment dans un duo poétique et peu connu de Frederick Ashton, Voices of Spring (1977), très joliment dansé par Maria Kochetkova et Davit Karapetyan. La même poésie, sur le duo piano et violon d'Arvo Pärt se retrouve chez Christopher Wheeldon , dont le San Francisco Ballet possède plus de dix œuvres, avec After the Rain, lente ondulation d'un couple où la femme évolue dans les airs grâce au magnétisme de la chinoise Yuan Yuan Tan, une vraie révélation.

 

 

 

D'autres pièces permettent de mettre en valeur la compagnie. La Classical Symphony de Yuri Possokhov tombe à point nommée pour cela, avec ses suites efficaces pour 14 danseurs et danseuses aux tutus en simple corolle.

 

 

 

 

Quand à Balanchine, par trois fois à l'affiche, il n'est pas si bien servi : le quatrième mouvement et finale de Symphony in C qui achève la soirée avec des costumes noirs et blancs loin du bling-bling Lacroix de l'Opéra de Paris, ne nous a pas paru être bien rythmé et accentué, tout comme le duo d'Agon (dansé par Sofiane Sylve et Luke Ingham), étonnamment intellectualisé. ; Reste une « découverte » , l 'extrait de Brahms-Schoenberg Quartet, étonnant pas de deux et entrées de trois filles assez démodé, avec ses ports de bras maniérés mais qui nous a permis de retrouver à Paris un visage connu : celui de Mathilde Froustey. La jeune soliste de l'Opéra de Paris, pleine d'avenir mais jamais promue, a décidé de tenter sa chance du côté de l'Amérique. À la revoir ici, nommée principal, épanouie, et si bien entourée, on se dit qu'elle a eu, pour l'heure, bien raison.

 

 

La suite de cette tournée de la troupe californienne, permet de voir plus d'une quinzaine de ballets dans des programmes différents chaque soir, ainsi que des cours publics et une programmation passionnante de films de danse, concoctée par notre confrère René Sirvin, à voir jusqu'au 24 juillet au Cinéma le Balzac.

Ariane Dollfus

 

Étés de la danse : http://www.lesetesdeladanse.com/

http://www.cinemabalzac.com/public/index/actu.php?id=788

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