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The Recoil of Words de Tania Carvalho

Cela fait longtemps que Tania Carvalho n’arbore plus son crâne rasé de punkette de l’époque où elle fonda Bomba Suicida. Que reste-t-il de l’esprit provocateur de ce collectif portugais ? Carvalho enchaîne les créations et expérimentations, ouvrant chaque année une nouvelle pochette-surprise. Cette année, sa mue a trouvé chaussure à son pied au Théâtre des Abbesses, dans le cadre des chantiers d’europe Lisbonne-Paris. The Recoil of Words, sa création 2013, est une formidable partition pour six mains et six jambes aux accents de cinéma muet, de mime corporel garnie de références au ballet, le tout remis au goût du jour, d’abord dans un silence assourdissant, ensuite par des tons continus de cornemuse joués live. La force provocatrice de Carvalho, version 2013,  est donc sensiblement affinée, car résidant dans les interstices !
En scène, la très athlétique Marlene Monteiro Freitas, performeuse déjantée (on a pu voir également son solo Guintche), le danseur de formation classique  Luis Guerra et Carvalho elle-même passent par tous les registres corporels, du lutin au prince, du Pierrot aux pointes. Leurs études très graphiques rappellent les premières images mouvantes ainsi que les mimodrames d’Etienne Decroux. Et chaque style correspond à un élément des costumes délicieusement datés, avec leurs académiques décalés évoquant autant le ballet classique, les années 1980 et le XVIIe siècle.
Dans leurs tableaux vivants aux gestes précis et ciselés, exécutés à la vitesse de danseurs de Krump, la mécanique grotesque et poétique fait merveille, tout comme les effets d’illusion d’optique résultant d’une étonnante coordination entre mouvements et changements de lumières. Belle démonstration de ce qu’on peut créer avec une dramaturgie basé sur les moyens d’expression chorégraphiques.
Luis Guerra poursuit par ailleurs sur cette lancée, dans deux brefs solos intitulés 3 interludes et le galop du nez ainsi que  La première danse d’Urizen, entre Bauhaus, Béjart, ballet et attitudes grotesques. Dans le premier, sur un ton continu produit par un orgue classique, ses bras semblent pousser vers l’infini et ses mouvements, toujours aussi précis et rapides, semblent sortir d’une réinterprétation clownesque d’un personnage du Sacre du printemps. La seconde partie propose une déconstruction joyeuse et loufoque de l’orchestre symphonique ou de cirque. Guerra, qui aime aussi se jouer des frontières entre les sexes, fait chavirer le ballet du 20e siècle, avec un clin d’œil amusé au mime blanc.
Thomas Hahn
Théâtre des Abbesses, chantiers d’europe Lisbonne-Paris, juin 2013
The Recoil of Words
direction & chorégraphie Tânia Carvalho
musique Julia Wolf (lad, solo bagpipe and audio playback)
musicien Jean Blanchard
son Régis Estreich
lumièresZeca Iglésias
costumes Aleksandar Protic
interprétation
Tânia Carvalho, Luís Guerra, Marlene Monteiro Freitas

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