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« Milonga » : Sidi Larbi Cherakoui et le tango

La milonga est une danse rapide, envolée et joyeuse. Tout le contraire du tango. Et pourtant, on appelle « milongueros »ceux qui pratiquent le tango pour leur plaisir. Sidi Larbi Cherkaoui a donc raison d’appeler sa revue argentine « Milonga », puisque c’est bien le terme qui désigne les soirées dansantes dédiées au tango. Et voilà que le scénario du spectacle était tout trouvé. Nul besoin de chercher plus loin. Six couples se retrouvent pour danser, dans un bar de Buenos Aires. L’orchestre est sur scène, au fond, côté jardin, et enchaîne les classiques du genre. Au centre de la scène, les pas de deux les plus audacieux sont applaudis par les autres couples, on se dispute une femme, on joue des scènes de jalousie ou se promène à travers des vidéos tournées dans les rues de la capitale argentine. La carte postale est impeccable. Pas facile de distinguer Milonga d’autres revues tango créées aux abords du Rio de la Plata, comme celle intitulée Chantecler, déjà en route pour le Théâtre du Châtelet. Nul doute que Cherkaoui, avec sa Milonga, va ouvrir le public de la danse contemporaine  à ce type d’entreprise argentine. Par ailleurs, Chantecler pourrait même se révéler plus varié dans son approche du tango que Milonga

De toute évidence, les bases du Milonga viennent des couples argentins. La question qu’on se pose en regardant cette revue est de savoir comment les deux pôles ont pu travailler ensemble. Ici Cherkaoui le silencieux aux accents spirituels et là, les Argentins extravertis à la sensualité exubérante. Et pourtant le chorégraphe bruxellois se dit enchanté par cette collaboration. Il s’est par ailleurs penché sur le tango de manière bien plus intime qu’on ne le soupçonnerait, pour réaliser ici un projet qu’il couvait depuis plusieurs années. Reste que Milonga ne ressemble en rien aux autres projets de Cherkaoui, basés sur la rencontre de cultures et traditions diverses. Ici, le tango rencontre le tango.

Comment un chorégraphe contemporain peut-il donc  intervenir sur cette danse de couple, basée sur la connaissance profonde du partenaire et orchestrée, pour sa plus grande partie, au sein du couple? Cherkaoui intervient ici bien plus comme metteur en scène et la chorégraphie est officiellement signée « Sidi Larbi Cherkaoui et ses danseurs ». On ne rafistole pas le matériau chorégraphique de milongueros aussi chevronnés, et Cherkaoui fait bien de ne pas créer artificiellement une version « contemporaine ». Le public lui en sait gré et ovationne les danseurs. Et aux saluts, Cherkaoui, le modeste, le timide, laisse les interprètes seuls savourer les ovations du public.

Si innovation il y a, on la trouve dans la scénographie d’Eugenio Szwarcer, qui emploie des méthodes de projection de pointe comme le mapping, pour faire naître, sur des silhouettes blanches, des doubles des personnages ou leurs ombres. La mystérieuse animation ainsi produite est une belle réponse à l’exaltation sensuelle.

Thomas Hahn

Arcachon - Festival Cadences

Prochaines dates  Milonga : du 27 novembre au 7 décembre, Grande Halle de La Villette

Chantecler Tango : du 9 octobre au 3 novembre au Théâtre du Châtelet - Paris

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