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« Stone » clip chorégraphié par Stéphane Deheselle

Les choses étant ce qu’elles sont, le monde se dématérialisant, celui de la danse n’échappe pas à cette fatalité. Désormais, les chorégraphes œuvrent d’abord pour l’image, un théâtre virtuel faisant encore appel au corps. La chanson Stone d’Inna de Yard est ainsi devenue un clip de Nico de Pouldou, chorégraphié et dansé par un champion mondial de « Juste debout », dans la catégorie expérimentale, le Belge Stéphane Deheselle.

D’après lui, « les choses se sont faites naturellement » : un vinyle traînait par là, il l’a écouté et l’affaire a commencé, sans que ni le filmeur ni le danseur ne tiennent compte de la destination finale de leur objet. Très simplement, presque naturellement, au bout de quelques tests de danse-image in situ, captés en vidéo sur la plage de Trestel, dans le Trégor, « la magie a opéré ». Le druidisme, avatar local du chamanisme, a permis, c’est probable, la fusion entre l’art de Terpsichore et un tel cadre naturel.

Après deux-trois prises en tout et pour tout, l’opération était bouclée. Le chorégraphe comme l’homme à la caméra reconnaissent leur dette envers Michael Jackson – ils n’ont pas, étant jeunots, eu l’heur d’explorer l’univers d’un Astaire, d’un Decroux, d’un Marceau. La clarté expressive de l’un et l’utilisation graphique du contrejour par l’autre font leur effet. La voix apaisante de Derajah, chanteur-percussionniste ayant rejoint le collectif jamaïcain « roots » Inna de Yard, les accords du reggae languissant (pléonasme), le coucher de soleil en appellent à la contemplation.

Si l’on n’est pas disponible ou, tout bêtement, sensible à ce type d’écoute, on peut passer sa route. Dommage, en l’occurrence, car il y a aussi à voir. Le morceau est filmé d’un tenant, d’un jet, d’un trait. En plan-séquence, de l’entame au final. Le spécialiste du genre, Jean Rouch lui-même, prétendait n’en avoir réussi qu’une poignée dans sa vie et en plus de cent films. Les bonnes vibrations semblent avoir été réunies pour l’occasion, pour le clip Stone, que l’on peut associer à Stonehenge, haut lieu du monde celtique.

Qui dit nuit, dit ombre, donc double en 2D du corps dansant. Depuis l’enfance, Stéphane Deheselle a pris l’habitude de jouer avec la sienne. La chorégraphie est un portrait découpé comme ceux, au XVIIIe siècle, empruntèrent leur nom commun à celui, propre, d’Etienne de Silhouette. L’élégance du mouvement et la légèreté du passage, de cour à jardin, du danseur que la lumière prive, trois minutes durant, de son identité, ne font pas de doute. L’absence de récit, d’anecdote, d’illustration sont un plus. La première prise fut la bonne. En deux jours et un plan-séquence, la messe était dite.

Nicolas Villodre

 

 

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