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« (sans titre) (2000) » : Tino Sehgal, Boris Charmatz, Frank Willens

Depuis son arrivée au CCN de Rennes et de Bretagne qu'il a rebaptisé Musée de la danse, Boris Charmatz poursuit sa démarche d'exploration de l'histoire de la danse. À sa manière très particulière. Ainsi n’est-il pas étonnant qu’il ait repris en 2013 une des pièces les plus emblématiques de Tino Sehgal, Twenty minutes for the XXth century, la pièce qui scellait le départ du plasticien-performer des scènes pour se consacrer à ce qu'il a appelé les « situations construites » qu'il réalise dans les grands musées du monde. Renommé pour l'occasion (Sans titre) (2000), sans doute parce que depuis 2000 et les « situations construites » l'artiste anglo-allemand refuse toute trace matérielle de son œuvre. Pas de programme, pas de titre sur le billet, pas de captation, seules restent les images et les impressions du spectateur. Ce qui n'est pas sans le dérouter, nobostant la nudité du propos.

En effet, le dispositif est d'une simplicité biblique. Il peut même sembler aride, à première vue. Un plateau nu en pleine lumière rappelant le white cube de l'espace d'exposition, un homme nu qui danse des images de danse. Rien de tangible auquel se raccrocher sinon ce corps qui bouge, ce corps qui donne à voir ses contours, ses espaces, ses ombres, ses recoins cachés, ses tressaillements, ce corps qui imprime un rythme aux postures qui s'enchaînent. Un corps tour à tour souffrant, grotesque, sublime, joyeux que seul la chair et les nerfs font parler. Il n'y a nulle possibilité de se raccrocher à un fil narratif, d'autant que si les séquences choisies (une vingtaine) peuvent être reconnues par les spécialistes qui y trouveront matière à devinettes, elles s'enchaînent de façon totalement imprévisible.

Tissant ainsi d'improbables correspondances qui sont autant de surprises et d'éclairages singuliers sur la collection de gestes choisies par le plasticien. Autant de questionnements, aussi. L'intelligence du propos réside également dans la répétition du solo par deux interprètes aux parcours et aux gabarits différents, Boris Charmatz et Frank Willens, performeur-chorégraphe américain installé à Berlin. Les variations ne sont pas forcément flagrantes mais elles rendent sensibles les différences que constituent deux individualités, avec leurs caractéristiques spécifiques et leur bagage culturel et mémoriel, les infimes écarts que constituent chaque regard et chaque apprentissage. Réflexion sur l'interprétation, sur la transmission autant qu'ode au corps humain, au mouvement et à sa puissance d'é(in)vocation, Sans titre est une pièce radicale mais sans doute majeure.

Gallia Valette-Pilenko

Vu le 2 février au Moi de la danse aux Subsistances, Lyon

(sans titre) (2000) conception Tino Sehgal, interprétation Boris Charmatz, Frank Willens  conception Tino Sehgal, interprétation Boris Charmatz, Frank Willens

Mardi 30, mercredi 31 mai 2017 Le Quartz, scène nationale de Brest

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