Error message

The file could not be created.

Raimund Hoghe et Takashi Ueno à la Ménagerie de Verre

Dans Pas de deux, duo créé en 2011, Raimund Hoghe et Takashi Ueno mettaient en scène leur rencontre, se découvrant des similitudes étonnantes. Songs for Takashi pourrait en être la suite, où ils envisageant désormais leur relation sous l’angle bienveillant de la différence amicale. Toujours aussi complices, mais avant tout complémentaires, Ueno et Hoghe exploitent au maximum leurs contrastes morphologiques et énergétiques, à la manière de certains grands duos d’artistes, tels Laurel et Hardy.

Vidéo réalisée par Eric Legay pour Danser Canal Historique

Le Japonais calligraphie sa danse, si aérienne et élancée, en incurvant et pliant son corps à volonté alors que Hoghe, souvent immobile, insiste sur sa petite taille dans des affinités plutôt telluriques. Mais tous les deux flirtent avec la féminité, chacun à sa manière.

Hoghe en diva tragicomique

Depuis la création de Pas de deux, Hoghe développe son personnage de chanteuse, ou plutôt de la résonance d’une diva, captée par un admirateur masculin. Pleine d’autodérision, cette vision tragicomique de lui-même, qu’il continua de développer dans Quartet en 2014, est également une manière de s’incliner devant Kazuo Ohno, qui compte beaucoup pour Hoghe.  Mais il prend un tout autre chemin vers la féminité, en se drapant abondamment et en chaussant des lunettes de soleil très 1960.

Face à lui, Takashi Ueno reprend d’Ohno le côté éthérique et aérien, tout en passant à l’acte de courir et de sauter, envolées qu’Ohno se contentait de suggérer. Aussi incarnent-ils deux facettes opposées d’un Ohno rendant hommage à La Argentina, danseuse de flamenco historique (Admiring La Argentina, 1977). Mais Songs for Takashi ne cultive pas les ambiances nipponnes, au contraire!

Un rêve de Méditerranée

Nous sommes plutôt sur les pas de La Argentina. A la fin de la pièce on rêve peut-être de tomber, en sortant du théâtre, sur une rue près d’une plage et emplie de bodegas. Pas de dominance flamenca ici, mais avec leurs costumes de ville noirs, quelques airs espagnols, italiens ou portugais (renaissance, Fado, chansons) et leurs attitudes, les deux savent transmettre la vivacité méditerranéenne autant que la chaleur accablante ou le farniente des vieux qui regardent le jeu des vagues et leur vie écoulée.

A la fin, après avoir mis en scène un enterrement, Hoghe fixe des fleurs sur le costume d’Ueno qui vrille, comme pour repartir vers la vie. Des fleurs pour dire la beauté et la condition éphémère de la vie. Liberté et joie de vivre pour et par Ueno, quiétude, attente et infinité avec Hoghe.

Voilà qui est tout à l’image de ce duo qui semble d’abord s’étirer au maximum, avent de prendre un envol final spectaculaire avec Le Temps chanté par Charles Aznavour.

C’est un cadeau émouvant que de recevoir, des archives du grand mélomane de Hoghe une playlist comme celle-ci, forte de vingt-quatre titres, où l’on entend Aznavour, Victoria De Los Angeles, Liza Minelli, Peggy Lee, Ennio Morricone, Isabelle Huppert et tant d’autres. Et Raimund vogue…

Thomas Hahn

Le 26 novembre 2015 - Ménagerie de Verre - Festival Les Inaccoutumés.

Catégories: 

Add new comment