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Nathalie Pernette à l'Abbaye de Cluny

Nathalie Pernette crée La Figure du gisant (Une pierre presque immobile) à l'Abbaye de Cluny les 12 et 13 juin 2015 à 21h. Un nouvel opus réalisé grâce à la manifestation «Monuments en mouvement», programme que le Centre des monuments nationaux a lancé en 2015 et qui réunit des chorégraphes dans des lieux chargés d'histoire.

Photos Thomas Hahn

« Le monument et l’œuvre dansée occupent un terrain. Ils s’y déploient par mouvements successifs d’expansion ou de repli, et lui donnent sa mesure, qui est faite tantôt d’infini, tantôt d’intimité ; et de même que le monument, en résistant au passage du temps et en nous donnant à voir les vestiges d’un passé révolu, nous projette en dehors de notre chronologie ordinaire, de même la chorégraphie cherche-t-elle à suspendre l’écoulement des heures quotidiennes en nous imposant le rythme de sa temporalité propre. » nous dit Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux.

L’abbaye de Cluny fut le plus grand édifice religieux du monde occidental jusqu’en 1506, date à laquelle elle fut supplantée par la Basilique Saint-Pierre de Rome. Jusque-là, ces cinq nefs et ses 187 mètres de long assuraient sa renommée dans l’Europe entière. Dès son origine indépendante du pouvoir séculier par une charte datant de 909, l’abbaye de Cluny, fut un foyer culturel et intellectuel majeur, où furent pensés et rédigés des textes qui dictèrent leur règle aux puissants. « L’abbaye a toujours défendu des valeurs de paix, en l’imposant aux seigneurs, de culture européenne, grâce à son scriptorium qui conservait des manuscrits de l’Europe entière et d’accueil », explique  François-Xavier Verger, administrateur de l’abbaye, « ce sont des symboles que nous conservons, cette manifestation en faisant partie. »

Photos Thomas Hahn

Nathalie Pernette y a travaillé en résidence, réunissant quatre danseurs de sa compagnie et une douzaine d’amateurs pour peaufiner sa création La Figure du gisant, spectacle déambulatoire comprenant sept stases suivies par 150 spectateurs privilégiés.

Ajoutant quelques éléments scénographiques très discrets faisant revivre le passé de l’abbaye et ces curieux fantômes portés par les corps des danseurs qui habitent un lieu en partie effacé puisque Cluny a été en (grande) partie détruit à la Révolution. Les danseurs font donc surgir de la pierre un passé révolu.

Photos Thomas Hahn

Habillés dans des tons qui rappellent tout autant les murs clunisiens que les robes de bures, se détachent du paysage, baignés d’une lumière crépusculaire (le spectacle commence à 21h, « entre chien et loup »). La gestuelle, extrêmement concentrée, passe de l’immobilité au mouvement presque subrepticement, rappelant même à certain moments, la minéralité suivie de fulgurances d’arts martiaux extrêmes orientaux.

Le fait même de considérer les corps dans cette architecture en magnifie le volume et provoque des sensations très particulières, comme celle de se sentir happé vers le haut par la voûte du clocher de l’eau bénite, de respirer la sérénité du cloître, de mesurer le solennel couloir. Du cloître au farinier, se tisse peu à peu une histoire dansée peuplée de formes qui surgissent et s’estompent.

Photos Thomas Hahn

Donné les 12 et 13 juin dans l’abbaye, Figures du gisant, est le premier volet de la pièce chorégraphique Une Pierre presque immobile, qui sera présentée à la Basilique de Saint-Denis en octobre prochain. Un rendez-vous à ne pas manquer.

Pourtant, dans ce contexte très chargé d’histoire (n’oublions pas que la Basilique abrite les vrais gisants des rois de France), il a fallu donner tous les gages d’une bonne tenue. « La danse étant toujours un peu suspecte, raconte Simon Pons-Rotbardt, programmateur de ces Monuments en mouvement, et charrie avec elle des peurs liées au débordements des corps, à la nudité notamment. J’ai assuré aux représentants du clergé que je voulais pas provoquer, mais au contraire, redonner à ces lieux toute leur puissance spirituelle ». Pour preuve, les danseurs de Nathalie Pernette sont habillés jusqu’au cou. La seule chair visible sont les mains et le visage. À tel point que « rencontrant des religieuses en visite dans l’abbaye, nous étions si semblables dans nos costumes, que nous avons été surprises et nous nous sommes saluées » s’amuse Nathalie Pernette.

 

Cette création est le deuxième spectacle de « Monuments en mouvement », une opération initiée par le Centre des Mouvements nationaux pour ouvrir les lieux patrimoniaux aux œuvres dansées. Le premier ayant été l’intervention de Radhouane El Meddeb au Panthéon en avril, où il avait créé Héros, courte pièce pour des danseurs amateurs qui s’entraînent au CentQuatre à Paris

Suivront donc, outre l’aboutissement de la création de Nathalie Pernette à Saint-Denis le 17 octobre prochain, Cavale de Yoann Bourgeois au Trophée d’Auguste à La Turbie (Alpes-Maritimes) les 13 et 14 juin. Et à la Place Forte de Mont-Dauphin (Hautes-Alpes) les 30 et 31 juillet.

Puis Où chaque souffle danse nos mémoires de Thomas Lebrun : Au château d’Azay-le-Rideau (Indre-et-Loire) le 11 septembre. Au palais Jacques-Cœur (Cher) le 13 septembre. Au château de Châteaudun (Eure-et-Loir) le 15 septembre.

Agnès Izrine

Renseignements. : www.monuments-nationaux.fr

 

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