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« Les Chatouilles ou la danse de la colère » d' Andréa Bescond

Entre danse, théâtre, humour et drame, ce one-woman-show raconte la vie d’Odette et dénonce l’odieuse salissure de son enfance.

Avec pour tout décor une simple chaise blanche, Andréa Bescond ose parler de ce que tout le monde sait, sans jamais vraiment oser le dire : la pédophilie.

A huit ans, Odette subit les attouchements de Gilbert, un ami de la famille. Ces séances se renouvellent souvent alors que la mère de la jeune enfant ignore, ou feint d’ignorer, l’horreur de la situation. Femme égocentrique et possessive, elle refuse d’entendre ce que sa fille tente de lui faire comprendre. Non, son enfant a toujours tort, est capricieuse et doit subir les injonctions des adultes. Mais, Odette survit grâce à ses cours de danse classique. Ces moments où elle doit surpasser son corps, le faire souffrir pour atteindre la perfection, arriver à ne penser qu’à elle, donc oublier ce drame qui la ronge de jour en jour.

Ce résumé pourrait faire croire qu’il s’agit d’une pièce larmoyante. Mais il n’en est rien étant donné qu’Andréa Bescond joue à elle seule tous les personnages inhérents à son histoire en passant de la petite fille à Gilbert, de sa mère au juge lors du procès du pédophile au tribunal…. Soit une pléiade de gens plus ou moins méprisables dont peu l’aideront à s’en sortir. La courte scène où elle vient déposer plainte au poste de police est irréelle. « Mademoiselle, s’il n’y a pas eu de pénétration, on ne peut rien faire. Mais si, il y a eu pénétration ».

Et là, face à l’adolescente traumatisée, les flics hurlent de joie car ils vont enfin pouvoir arrêter Gilbert qu’ils cherchent à attraper suite à plusieurs autres plaintes. L’autre immense talent d’Andréa Bescond réside dans sa passion, la danse, qu’elle interprète superbement bien entre classique, hip hop, ballet de comédie musicale et danse érotique (irrésistible). Mais surtout, cette remarquable comédienne et excellente danseuse, a subtilement intégré de fortes doses d’humour plus ou moins noires pour narrer ses terribles souvenirs.

Car il s’agit de faits réels donc de sa propre vie. Elle a débuté la danse à trois ans pour suivre plus tard l’école de Rosella Hightower, le conservatoire national supérieur de danse de Paris et remporté le prix Espoir Féminin du grand concours international de Paris en 1998. Elle a travaillé avec Bill T Jones, Bianca Li, Georges Momboye ainsi que dans de nombreuses comédies musicales. Si l’on ajoute que la mise en scène d’Eric Métayer est réglée comme du papier à musique, ne laisse aucun temps mort, ne rajoute rien de mélo au drame, casse avec perfection les séquences bouleversantes et agence une progression dramatique avec une infinie finesse, ce spectacle qui a reçu le Molière 2016 pour « Seule en scène » est unique, poignant, vrai, drôle, sauvage, sensible et tragique.

Quelle belle idée de Thierry Malandain de programmer une telle œuvre au sein du Festival de Le temps d’Aimer la danse car dans la salle, bon nombre de femmes se sont senties concernées et ne pouvaient cacher leur émotion lors de la standing ovation finale. Cette enfance volée sauvée par la danse, soit le croisement entre théâtre et danse est un splendide et vibrant hommage à l’art et à la vie.

Sophie Lesort

Les Chatouilles ou la danse de la colère de et par Andréa Bescond, mise en scène Eric Métayer. 19 et 20 octobre 2016 au Châtelet - 20 janvier 2017 théâtre Simone Signoret à Conflans Ste Honorine - 31 janv. 2017 à l’Espace Carpeaux, Courbevoie - 4 février à Reyrieux – 11 mars à Claye Souilly – 21 mars à Fougères et le 26 avril au Colisée, Roubaix

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