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La Seine Musicale - une scène pour la danse ?

L’ouverture du complexe sur l’île Seguin a révélé la salle qui accueillera Les Etés de la Danse et donc la compagnie Alvin Ailey.

La Seine Musicale semble flotter dans la Seine, tel un paquebot. Et aussi paradoxal, aussi injuste que ce soit, son énorme boule vitrée sera perçue comme un nouvel étendard culturel de Paris. Car l’île Seguin n’est pas Paris. Nous sommes à proximité du pont de Sèvres, entre Meudon et Boulogne-Billancourt, et La Seine Musicale est financée par la ville et surtout par le département Hauts-de-Seine.    

La métaphore du paquebot, aussi proche soit-elle des intentions de ce geste architectural, serait à remplacer par celle d’un navire militaire, surplombé par l’énorme boule de verre et de bois dans laquelle se reflète l’eau d’un bassin carré. Un énorme panneau solaire, courbé, pointu, triangulaire, tourne autour de la sphère en suivant le cours du soleil. La forme du voile renforce encore les associations maritimes. Certains reprochent à cette réalisation des architectes Jean de Gastines et Shigeru Ban un aspect trop terne. Il est vrai que tout le charme a été placé dans l’énorme boule, sa membrane et sa voile. Les longues façades grises sont priées de s’effacer…

Deux salles: si proches, si opposées….

La Seine Musicale, on le sait, ce sont deux salles très différentes l’une de l’autre. L’Auditorium est consacré à la musique acoustique et accueille l’Insula Orchestra, dirigé par Laurence Equilbey, en résidence permanente. L’autre salle, baptisée Grande Seine, est pensée pour les grandes messes de musiques amplifiées et peut accueillir quelques quatre mille spectateurs, voire six mille, en enlevant les sièges face au plateau. C’est là que se produira l’Alvin Ailey American Dance Theater pendant le mois de juillet.

Le passage des Etés de la Danse à La Seine Musicale est logique. Ayant quitté le Théâtre du Châtelet, fermé pour travaux, Jean-Luc Choplin est aujourd’hui aux commandes artistiques de ce nouveau complexe culturel qui s’intègre dans un concept global pour l’île Seguin signé Jean Nouvel. L’emplacement de La Seine Musicale est certes moins central que la place du Châtelet, mais il offre en compensation la possibilité de profiter d’une promenade dans le jardin qui couvre cette nouvelle salle aux dimensions généreuses.

Galerie photo © Thomas Hahn

La Grande Seine

Cette Grande Seine, est-elle pour autant appropriée à un spectacle de danse? Pensée pour des événements comme le concert d’ouverture de Bob Dylan qui a eu lieu le 21 avril, son volume se compare à ceux d’arènes majeures comme le Zénith ou Bercy. Cette vaste salle s’animera de façon très festive sous l’énergie et la puissance acoustique et visuelle des stars du rock, de la variété, du jazz etc., à l’aide des projections sur écran géant… On y verra aussi des comédies musicales comme West Side Story. Mais concernant les spectacles de danse, on peut nourrir quelques craintes quant au rapport scène-salle. La venue de la troupe newyorkaise en juillet prochain sera la première occasion de vérifier l’impact de cette salle sur la danse.

L’Auditorium

Passons à l’Auditorium, inauguré par un concert classique de l’Insula Orchestra, de Mozart à Beethoven. Niché à l’intérieure d’une ruche réfléchissante, drapé d’un voile géant qui produit une partie de l’électricité, l’Auditorium se présente dans un look très « nature ». Les architectes ont collaboré avec les ingénieurs de Nagata Acoustics et Lamoureux Acoustics pour créer une ambiance chaude, où sa salle entière est enveloppée de bois.  Au plafond 28.000 bagues en carton ignifugé ont été regroupés en 916 hexagones rappelant les rayons d’une ruche. Sous leur trame, le miel acoustique venant du plateau se répand au gré des lamelles contreplaquées de chêne qui rappellent des tresses d’osier.

Un vignoble dans une boîte à chaussures

C’est une salle conçue selon le modèle du « vignoble », mais sa conception est nettement plus sobre que celle de la Philharmonie de Paris. L’Auditorium de La Seine Musicale flirte avec le principe du théâtre à l’italienne et ses balcons entourent la salle d’un seul trait. Le résultat acoustique diffère  des salles contemporaines en configuration « vignoble », souvent critiquées pour leur son très clair mais un brin trop percutant. Ici, beaucoup de douceur et d’harmonie, au risque de perdre en clarté.

L’acousticien de renommée mondiale Yasuhisa Toyota est pourtant le même qui a travaillé sur les philharmonies de Paris et de Hambourg. Cette dernière a été fustigée, après ses concerts d’ouverture, pour les différences entre l’impression acoustique reçue dans différentes parties de la salle. Le nouvel Auditorium tente un compromis intéressant entre les principes de « vignoble » et de « boîte à chaussures » et assure un résultat acoustique beaucoup plus équilibré.

Pourra-t-on aussi y danser ? La Philharmonie de Paris, sous la direction de Laurent Bayle, a accueilli des spectacles de danse à plusieurs reprises. Pourtant, la scène y est plus largement entourée du public qu’à l’Auditorium de La Seine Musicale qui place assez peu de spectateurs derrière l’orchestre. S’il est impossible de transformer cette salle en boîte noire, le concert d’ouverture a prouvé que l’équipement est conçu pour créer des effets lumières assez riches. En plus, la salle offre un mur de fond qui paraît tout à fait exploitable. Et si l’avenir de la danse sur l’île Seguin se jouait dans cet écrin de bois?

Thomas Hahn

http://www.laseinemusicale.com

www.lesetesdeladanse.com

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