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Entretien avec Manuel Roque


Entretien avec Manuel Roque, jeune étoile montante de la danse québécoise, dans le cadre du MOI de la danse aux Subsistances, où il vient d'entamer sa prochaine création, qui sera présentée en mai 2017 à Montréal.

Danser Canal Historique : Vous êtes presque inconnu sur le sol français, parlez nous un peu de votre parcours...

Manuel Roque : ça a commencé avec l'école nationale du cirque de Montréal, puis le cirque Éloize où j'ai rencontré des créateurs qui m'ont ouvert le chemin d'autres possibles. Il n'y avait pas cette effervescence dans le cirque comme en France et je me suis vite ennuyé, je ne me voyais pas faire toujours le même numéro. De plus, il y a quinze ans, c'était définitivement plus facile pour un garçon de trouver des engagements. J'ai travaillé avec divers chorégraphes comme Paul-André Fortier, Sylvain Émard, Peter James. Il y a dix ans, je suis entré dans la compagnie de Marie Chouinard où je suis resté trois ans, je me souviens très bien avoir dansé le Sacre du printemps à Lyon (à l'Auditorium pendant la Biennale de la danse 2006. NDLR), avec l'orchestre parce qu'on n'a pas souvent dansé Le Sacre avec un orchestre. Ensuite je suis parti parce que je voulais créer mon propre matériel. J'ai créé un solo et un duo avant Data, mon premier projet d'envergure pour lancer ma compagnie. En même temps je travaille avec des chorégraphes et des compagnies de cirque.

DCH : Comment travaillez vous ?

Manuel Roque : je n'ai pas de méthode, pas de technique, pas de règle. Ça dépend des projets. Pour Data, projet kinesthésique très personnel, j'ai fait de l'exploration en studio. Pour mon quatuor présenté en décembre à Montréal, 4-OR, un spectacle quadri-frontal, c'était très différent, très éloigné de l'engagement physique de Data, très minimal. Alors qu'avec le trio que j'ai conçu à Potsdam, premier volet du diptyque que constitue ma prochaine création, c'est encore une tout autre histoire. Une partition infernale de sauts, qui questionne le dépassement de soi, une interrogation qu'on retrouve chez beaucoup de créateurs aujourd'hui. Nous avons travaillé sur la notion de réalité qui nous a amené à la notion de transe en prenant appui sur la « théorie des cordes » qui se développe sur onze dimensions, aussi ai-je établi des comptes sur 11, ce qui donne une danse hyper-athlétique et très verticale. À l'inverse, pour le solo sur lequel je travaille depuis deux semaines, qui répondra au trio, je reviens à l'horizontale, au sol, pour expérimenter ce qui se passe quand on lâche. Je suis d'ailleurs en train de m'apercevoir que j'ai passé la majorité de mon temps sur deux pattes, et qu'il est beaucoup plus facile de créer un momentum debout, en enclenchant un léger mouvement dans le bassin. Alors qu'au sol, c'est beaucoup plus compliqué, il y a tellement de surfaces de contact. C'est une expérience très étrange. L'outil que j'utilise quotidiennement depuis que je l'ai découvert chez Marie Chouinard, c'est le Continuum movement* qui me permet d'aller ailleurs, de trouver d'autres moteurs, d'autres connexions.

DCH : Quelle relation entretenez vous avec la musique ?

Manuel Roque : Amour/haine (il éclate de rire). Comme j'ai une formation de musicien, j'ai tendance à vouloir avoir le contrôle sur la bande sonore. Je cherche toujours le point de rencontre, j'expérimente toutes les possibilités. La musique fait partie de l'environnement extérieur qui interagit avec l'humain. Je suis particulièrement intéressé par les relations de l'homme à son environnement, par les liens qu'on peut tisser entre paysage intérieur et paysage extérieur et la musique fait partie.

DCH : comment et pourquoi êtes vous devenu chorégraphe ?

Manuel Roque : Je crois que je voulais être chorégraphe depuis très longtemps, ou tout du moins créateur. J’avoue entretenir un grand intérêt pour l’hybridation, la perméabilité des disciplines. Ma formation en est un peu un écho. En dansant, j'ai beaucoup observé comment les créateurs avec qui je travaillais opéraient. Avant de pouvoir créer, je me suis dit que je devais savoir danser et observer. ça m’a peut-être donné l’envie de ne pas mettre au point une méthode fixe de travail mais de construire une nouvelle méthode en lien avec chaque processus pour faire avancer le fond et la forme ensemble.

Propos recueillis par Gallia Valette-Pilenko

*pratique somatique axée sur les fluides du corps développée par Emilie Conrad et Linda Rabin
 

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