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Entretien avec Jean-Paul Montanari

L’édition 40 bis du Festival Montpellier Danse ouvre ses portes le 19 septembre prochain, avec notamment un temps fort jusqu’au 6 octobre rassemblant six créations, avant de se prolonger en archipels jusqu’en décembre, conjointement avec la « saison » de Montpellier Danse. Nous avons interrogé Jean-Paul Montanari sur cette nouvelle configuration en temps d’incertitude.
 

Danser Canal Historique : Comment mettre en place un festival et une saison dans la même temporalité ?

Jean-Paul Montanari : A la fois c’est la même temporalité mais dans deux espaces-temps très différents. C’est très étrange. Les spectacles du festival viennent avec leur aura personnelle. Bien sûr, nous savons que ça ne va pas ressembler à un festival traditionnel avec trois spectacles par jour, les réjouissances de fin de journée où tout le monde se retrouve, sans doute moins de journalistes et de professionnels assisteront aux premières, etc. Il n’y aura pas cette tension joyeuse où les gens se croisent, parce que c’est l’été, on va dîner, ce qui fait partie de ce qu’on appelle un festival. Néanmoins, il reste l’essentiel, c’est-à-dire l’œuvre et le public. Le reste ce sont des ornements. Beaucoup de gens se contentent de voir une pièce et rentrent chez eux. Les œuvres à voir dans le festival que ce soit So Schnell de Bagouet, LOVETRAIN 2020 d’Emanuel Gat, Moments of Young People de Raimund Hoghe, la création des Goldberg Variations, solo dansé et chorégraphié par Anne Teresa De Keersmaeker ou même WILDER SHORES de Michèle Murray, vont venir avec leur parfum de festival. Les pièces de la saison, dans ce dernier trimestre, puisque le festival court jusqu’à fin décembre, ne représentent qu’une petite section de la programmation. Il y a la création du solo de Christian Rizzo, Berezina de David Wampach — également présent dans le « festival » avec 3020— et Les Hauts Plateaux de Mathurin Bolze, la saison ne commence vraiment que de janvier à mars. Donc ils se superposent à peine. C’est donc tout de même un report du festival.

DCH : Comment vivez-vous cette période où tout est soumis à un principe d’incertitude ?

Jean-Paul Montanari : Evidemment en quarante éditions nous avions une expérience qui nous trompait rarement. La météo, le comportement des gens les uns avec les autres, la réaction du public, les questions que se posent les artistes qui viennent pour la première fois, nous avons une grande habitude de toutes ces interrogations et nous avions les réponses. Mais, avec ce qui vient de nous arriver à tous, nous vivons ça au jour le jour, en étant à peu près certain que ça va se passer… Quand nous avons imprimé le programme la semaine dernière, nous étions sûrs de la venue de Sharon Eyal et Robyn Orlin. Or, l’une ayant sa compagnie en Israel, l’autre devant répéter quatre mois en Afrique du Sud, leurs spectacles sont reportés à la prochaine édition à cause de la pandémie.

Autrefois ce qui était inscrit au programme était lettres d’or. Dorénavant, la réalité diffère. Nous en sommes tous là. Les sens de circulation du public sont également modifiés, il y a de nouvelles contraintes pour des raisons de sécurité. Il faut expérimenter toutes ces nouveautés. Le soir où Catherine Legrand va donner la première représentation de son So Schnell revisité, va certainement être très curieux. Revoir de la danse après sept mois d’absence…Ce ne sont pas non plus les mêmes attentes. Les spectacles issus du festival d’été viennent avec leur histoire, leur préparation, une autre spatialité, et d’autres enjeux sans doute, puisque ce sont des créations et ceux de la saison, plutôt des reprises. Le cas d’Emanuel Gat est à ce titre très significatif. Il devait faire l’ouverture la 40e édition et se retrouve en quatrième position début octobre. Néanmoins, on sent déjà un frémissement autour de l’œuvre à venir, dont on a déjà vu des répétitions très prometteuses, qui le replace, malgré tout, au tout premier plan.


DCH : Avez-vous conservé le thème voir et revoir initialement prévu pour cette 40e édition ?

Jean-Paul Montanari : Non. La structure du festival a explosé, la programmation étant éclatée en trois sections, la première étant assez conséquente, entre fin septembre et début octobre. Reste qu’un festival a son rythme propre, réparti sur quinze jours. Cela crée un effet de réponses, de problématiques d’un spectacle à l’autre. Là, 25% du festival est reporté sur la 41e édition, et les 75% qui restent sont répartis sur un trimestre. Donc, de mon point de vue, ça a disparu, il n’y a plus de thématique qui tienne. J’en reparlerai peut-être après, quand j’aurais vu la recréation de So Schnell de Bagouet par Catherine Legrand et Moments of Young people de Raimund Hoghe.

DCH : Néanmoins quand on aligne Raimund Hoghe, Bagouet relu par Catherine Legrand, et Emanuel Gat qui d’une certaine façon, travaille avant tout la matière et les processus, ou Anne Teresa De Keersmaeker avec son solo sur les Variations Goldberg, on voit que c’est la question de l’écriture ou de la réécriture qui domine, comme si le festival se concentrait sur l’essence même de ce qui compose la chorégraphie…

Jean-Paul Montanari : Peut-être, puisqu’il est vrai que pour moi, l’émotion jaillit souvent de l’écriture elle-même, quand elle parvient, presque miraculeusement, à donner à penser. Mais j’ai envie de faire un peu la même réponse que pour la question précédente.


DCH : De nombreux spectacles de la 40e édition vont être reportés sur la 41e. Comment envisagez-vous le prochain festival ?

Jean-Paul Montanari : Effectivement, la 41e édition est déjà largement construite. Nous réfléchissons en ce moment à une utilisation accrue de la Cour et du Théâtre de plein air de l’Agora, qui constituent les lieux de Montpellier Danse. De ce fait, étant plus indépendants, cela nous permettrait une plus grande élasticité des dates du festival. Il se trouve que les artistes sont très demandeurs de ces théâtres de plein air, qui souvent, ajoutent au spectacle la magie du cadre et la chaleur de la nuit. Et, en ces temps de pandémie, nous voyons bien que l’extérieur présente des avantages non négligeables.

Propos recueillis par Agnès Izrine

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