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Entretien avec Gisèle Vienne

Dans un grand huit émotionnel, quinze danseurs explorent à travers une fête, dont la structure évoque de nombreux rituels, l’aspect jubilatoire et exutoire de la violence.

DCH : Quel est le propos de Crowd, votre nouvelle création ?

Gisèle Vienne : Crowd fait référence aux fêtes qui créent une sorte d’utopie communautaire temporaire en répondant partiellement aux besoins de nouveaux rituels. Tout cela croise mon intérêt pour les cultures plurielles adolescentes, et répond aussi, selon moi à une quête de spiritualité. Je ne suis pas croyante, et je constate que nombreuses semblent être les personnes non croyantes à la recherche de ce que peut offrir le religieux sans la religion, la société laïque ne semble pas suffisamment prendre en considération ces besoins. La période que nous traversons en témoigne et l’espace artistique contemporain répercute ce besoin d’expériences spirituelles.

DCH : Comment intervient l’écrivain Dennis Cooper dans cette pièce ?

G.V. : Nous avons travaillé avec Dennis Cooper une sorte de surabondance narrative, comme un sous-texte, qui n’est pas audible, à cause de la musique de la fête, mais qui est présent dans chaque geste, chaque intention et finit par tramer une sorte de fil narratif pour chacune des 15 personnes en scène entre fiction et réel. Cela donne à la pièce une densité, comme dans un tableau riche en détails.

DCH : Avez-vous développé une écriture chorégraphique particulière pour quinze danseurs ?

G.V. : J’utilise beaucoup de mouvements « retouchés », grâce à des opérations ou des effets de l’ordre de l’accélération, du ralenti, du découpage et du montage inspirés par la réinvention des mouvements qu’offre le champ des possibles à travers les films. Ces qualités et types de mouvements ne sont toutefois pas imités, mais interprétés de manière très intime et extrêmement sensible. On oscille d’une grande puissance explosive à l’expression d’une profonde délicatesse, et dans ces deux extrêmes il s’agit bien toujours de la recherche d’une hypersensibilité tout comme d’un certaine expression de la force de l’abandon. Nous sommes à la recherche  d’un théâtre vécu et non joué, comme le décrit Michel Leiris*. Avec quinze danseurs le potentiel de ce type de montage et d’écriture est particulièrement passionnant d’un point de vue musical, chorégraphique et narratif.

DCH : Vous faites de nouveau appel à KTL (Stephen O’Malley et Peter Rehberg) qui a toujours accompagné vos pièces. Quelle est la place de leur musique dans Crowd ?

G.V. : Nous travaillons avec des musiques préexistantes des années 90 mais aussi 80 et même une de 2014, choisies par Peter Rehberg. Peter dirige un label, Editions Mego, et a une connaissance exceptionnelle de la musique industrielle et électronique qui est ici mise à profit. De fait, le réalisme est à cet endroit-là, avec des citations des artistes marquants de techno ou de musique électronique ancrés dans leur époque. Il y a également un morceau original de KTL qui perturbe autrement notre sentiment du réel et modifie notre perception tout en rappelant l’exaltation qui peut être recherchée à travers ces musiques et ces fêtes.

Propos recueillis par Agnès Izrine

*La Possession et ses aspects théâtraux chez les Éthiopiens de Gondar. (Plon, 1958)

Du 8 au 10 novembre à 20h30.Le Maillon, Théâtre de Strasbourg - Scène européenne, Parc des expositions, présenté avec POLE-SUD, CDCN Strasbourg dans le cadre de la Biennale de la Danse Grand Est et du Parcours Danse.

En tournée : Le 15 novembre au Manège de Reims, du 7 au 16 décembre à Nanterre-Amandiers, Centre Dramatique National, du 6 au 8 février au TNB de Rennes, 27 et 28 février à la MC2 de Grenoble, 29 mai à La Filature, Scène nationale de Mulhouse.

 

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