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Entretien Anne Collod

Anne Collod a présenté, à la Biennale de danse du Val-de-Marne, deux spectacles, la reprise de Parades & Changes et sa nouvelle création, Le Parlement des invisibles. Elle s’explique ici sur cette création basée sur Danse Macabre de Sigurd Leeder (1902-1981), chorégraphe expressionniste allemand dont on sait finalement peu de choses. Notre critique du spectacle est à lire ici.

 

Danser Canal  Historique: Le Parlement des invisibles inclut plusieurs fragments de Danse Macabre de Sigurd Leeder, sur scène et surtout en vidéo.

Anne Collod : Les vidéos montrent la recréation de la Danse macabre de Sigurd Leeder que j’ai transmise aux étudiants du CDC de Toulouse et des images d’archives du Fonds Sigurd Leeder en Suisse. J'ai recréé la pièce à partir de sa notation Laban, de la plume de Sigurd Leeder en personne. Cette pièce m'a servi de matrice et de gisement. Je l'ai altérée, fragmentée, distordue de différentes façons.

DCH : On perçoit des ramifications vers le butô, les carnavals allémaniques et autres univers.

Anne Collod : En effet, je suis allée faire des recherches au Japon, sur le Mexique et sur le carnaval. Il y a un lien fort entre le carnaval et la mort parce que le carnaval est un moment de bascule à travers lequel on redistribue les cartes et marque un renversement. On fête le renouvèlement, à partir de ce qui se défait et disparaît. De la même façon, ce que les défunts nous ont légué nous permet d'aller de l'avant.

 

DCH : Dans les tableaux expressionnistes les danseurs lèvent les bras vers le ciel de façon incantatoire et très ordonnée. On ressent comme une prémonition d'un ordre qui va s'écrouler. De façon métaphorique, on sent le sol se dérober sous les pieds des danseurs.

Anne Collod : La Danse macabre de Leeder date de 1935. Elle m'a intéressée par son côté très organisé et dessiné, sans vouloir y voir une référence au contexte allemand de l'époque. Elle reste très collective et organisée, mais c'est justement ce qui me permet de la déconstruire et altérer. Mais bien sûr, tout ça entre en résonance et fait écho à l'époque.

DCH : Je pourrais même imaginer cette danse-là, avec son côté graphique et ses mouvements à la limite du grotesque, frôlant la maladresse, comme des précurseurs de Cunningham qui disait qu'on mouvement commençait de l'intéresser à partir du moment où il avait l'air maladroit.

Anne Collod : Il est vrai qu'on part d'une organisation du corps très structurée et verticale avec des courbes de dos et un travail sur le haut du corps qui peuvent effectivement, de façon lointaine, rappeler Cunningham. Et nous travaillons avec des strates de souvenirs de la danse et de fantômes chorégraphiques.

DCH : Vous traversez différentes civilisations et époques. Pourquoi un tel puzzle?

Anne Collod : Il y a moins l'idée de passer d'une culture à une autre. L'idée est celle d'un voyage où les morts nous amènent à une transformation, ou plutôt où les vivants et les morts se transforment mutuellement. Aussi, le spectacle évolue du sombre au plus clair, en passant par une étape très colorée. Il y a tout un jeu sur le rêve et la mémoire, notamment dans la mémoire personnelle de chacun des interprètes. Cette mémoire-là se parcourt par étapes, en franchissant des seuils.

 

Propos recueillis par Thomas Hahn

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