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Biennale de la Danse du Val-de-Marne : Entretien avec Daniel Favier

DCH : Daniel Favier, pourquoi avez-vous intitulée cette Biennale « Danses exposées »

Daniel Favier : Pour plusieurs raisons. D'abord pour relier tout le travail fait autour des musées commencé B- project il y a quatre ou cinq ans autour de Jérôme Bosch et tout le travail effectué avec Dancing Museum, un projet européen qui verra sa réalisation finale lors de cette 19e biennale. Mais aussi parce que la danse s’expose de plus en plus dans les musées. Les chorégraphes qui ont renouvelé la danse sur scène lors des vingt années précédentes, s’attachent aujourd’hui à créer dans des espaces plus ouverts, avec une liberté extraodinaire vis-à-vis des formats et des publics.

L’idée était aussi de prendre toute la programmation comme une curation à l’échelle d’un territoire, comme un musée à ciel ouvert qui relierait entre elles les œuvres exposées. Avec des formes inédites, comme Tentatives d’approches d’un point de suspension de Yoann Bourgeois, ou Exposure, d’Anne Collod qui explore tout ce qui touche à l’énergie dans la plus grande chaufferie d’Île de France à Fontenay-sous Bois. Elle sert alimenter 14 000 logement et on n'a jamais accès à ce genre d'endroit. Anne Collod a réussi à faire un rapport entre la danse et la problématique de l'énergie.Des pièces  qui viennent transformer notre regard sur les corps et les objets dans notre environnement. C’est aussi le désir de relier des œuvres incontestables de grands maîtres anciens comme Jérôme Bosch , Gustav Klimt, ou Egon Schiele avec des pièces de chorégraphes d’aujourd’hui comme Le Jardin des délices de Marie Chouinard qui ouvre la Biennale ou Stil de Christian Ubl qui s’affrontent à ce genre de propos. Et c’est aussi considérer l'ensemble de la programmation comme des œuvres que l'on peut voir, revoir, travailler sur le patrimoine, le répertoire. Boris Charmatz, avec ses 20 danseurs pour le XXe siècle qui confronte les pièces chorégraphiques qui ont marqué le siècle aux œuvres modernes du MAC/VAL. Donc je trouvais que ce titre permettait de nombreuses ramifications. Et il fait la liaison avec Dancing Museum.

DCH : Justement, Elisabeta Bisaro, vous coordonnez l’opération Dancing Museums qui est un projet européen. Mais de quoi s’agit-il exactement ?

Elisabeta Bisaro : Dancing Museums ouvre la deuxième partie de la Biennale. C’est un projet de partenariat mené par La Briqueterie en association avec quatre centres européens dédiés à la danse et huit musées de renommée internationale, dont par exemple Le Louvre ou la National Gallery de Londres. Cinq chorégraphes internationaux explorent de nouvelles méthodes d’interaction avec le public, dont Tatiana Julien pour la France, mais aussi Juan Dante Murillo, Fabio Novembrini, Connor Schumacher et Lucy Suggate. Ils ont travaillé ensemble pendant les deux dernières années, toujours autour de Jérôme Bosch. Pour la dernière résidence nous avions envie de donner à voir le processus pour amener la danse vers des publics très variés dans un contexte hors théâtre. De ne pas créer de spectacle mais faire travailler les gens à une construction utopique : la Cité éphémère de la danse.  Pendant quatre jours, les chorégraphes vont partager leur monde au Mac/Val et à la Briqueterie. Le public pourra assister à des moments de réflexion, des répétitions, des échauffements, ou même des massages pour créer des lieux de détente dans un contexte muséal. Ensuite nous organisons des propositions de visites guidées ou chorégraphiées dans les espaces. Deux vidéastes vont travailler sur la partie virtuelle de l’événement pour animer ce troisième espace représenté par un blog, Facebook, etc. qui créent une autre dimension de partage. Il sera clôturé par un colloque international au Louvre.

DCH : Il y a un temps fort autour de la Triennale de Ouagadougou que vous avez intitulé « Donkelaâ Sîira », (le sillon du danseur). Pourquoi avez-vous ressenti ce besoin d’inviter l’Afrique dans cette Biennale ?

Daniel Favier : En fait Seydou Boro est un des artistes en résidence longue chez nous. Artiste complet, danseur et chorégraphe tout autant que musicien, il a aussi développé avec Salia Sanou, la Termitière, ce centre chorégraphique incroyable à Ouagadougou qui a accueilli la Triennale Danse l’Afrique Danse en 2016. Nous recevons donc, outre Le Cri de la chair de Seydou, des pièces phares qui ont jalonné la création africaine comme Figninto de Salia Sanou et Seydou Boro (1999), Ti chèlbè de Kettly Noël (2002) ou Gula (1993) de Vincent Mantsoe, mais aussi deux pièces de cette Triennale 2016 choisies par Seydou : Le Kombi de Jeannot Kumbonyeki et Métamorphose de Judith Olivia Manantenasoa. Complètent cette programmation africaine We almost forgot de Qudus Onikeku qui transcende parle geste la douleur inexprimée des traumatismes de guerre, de violences, et KAWRAL, la création de Salia Sanou avec le jazzman Laurent Blondiau qui présenteront aussi un grand projet amateur de danse et musique improvisées : Souffle rit, souffle danse. Il y aura aussi un colloque dansé : « Danse contemporaine : questions d’Afrique » à Morsang-sur-Orge, en partenariat avec Essonne Danse. « Donkelaâ Sîira », (le sillon du danseur) va passer pendant quinze jours dans la Biennale à Saint Maur, Charenton, Vitry, Champigny, La Villette…

DCH : On remarque pour cette Biennale une présence renforcée d’artistes qui viennent avec plusieurs spectacles…

Daniel Favier : Nous avons un focus sur Marie Chouinard au sein de cette Biennale puisqu’elle vient avec quatre pièces, mais aussi un temps fort autour de Maud le Pladec. Elle devait être artiste associée à la Briqueterie avant qu’elle ne soit nommée au CCN d’Orléans. Mais nous avons maintenu la programmation sur la Biennale où elle présentera CONCRETE, MOTO-CROSS, la création qu’elle réalise pour Concordan(s)e, Autoprotraits avec Piere Durcrozet, dont nous sommes partenaires également pour le spectacle The Spleen de  Franck Micheletti avec Charles Robinson. Nous avons également deux pièces de Radhouane El Meddeb, et deux pièces de Mossoux-Bonté. Mais il est également possible d’y voir un fil conducteur autour de la figure du père, notamment avec À mon père de Radhouane et MOTO-CROSS de Le Pladec !

DCH : On peut y voir aussi des fidélités…

Daniel Favier : Oui la fidélité compte beaucoup. C’est aussi le cas avec Tu, el cielo y tu la création de Catherine Berbessou que j’avais soutenu à l’époque où je travaillais aux Hivernales, mais aussi de Chris Haring, lui aussi inspiré par Bosch pour Deep Dish.

DCH : Il semblerait que désormais, la Biennale de la Danse dépasse largement le cadre du Val-de-Marne où elle s’implante depuis toujours…

Daniel Favier : Nous avons plus de partenaires et de lieux en Île-de-France. C'est la première fois avec le Théâtre Louis Aragon de Tremblay ou Le Plus petit cirque du monde de Bagneux, par exemple. On continue avec Le Théâtre de Châtillon et le TPE Bezons. Et puis nous sommes en train d'ouvrir sur l’Essonne. Le territoire 12 du Grand Paris se partage entre le Val-de-Marne et l’Essonne. C'est notre ambition de couvrir plus de ville en Île-de-France. Les théâtres partenaires s’investissent davantage dans les coproductions pour les créations. C'est un effet induit par la programmation. Nous avons nous-mêmes beaucoup coproduit, y compris quand la création n’a pas eu lieu chez nous. C’est le cas, par exemple de Radhouane El Meddeb qui a donné la Première à Montpellier Danse. Le Conseil Général a également soutenu beaucoup de projets initiés par la Biennale pour renforcer le montant des coproductions. C’est une bonne chose en ces temps où les artistes ont de plus en plus de mal à boucler leurs budgets de création.

Propos recueillis par Agnès Izrine

19e Biennale de la Danse du Val-de-Marne du 1er mars au 1er avril 2017

http://www.alabriqueterie.com/fr/biennale-de-danse/agenda-biennale

 

 

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