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« Badke » Augustijnen, Torres Guerrero, De Vuyst

Badke commence dans le noir et dans le silence. On entend des pas qui frottent, des martèlements, des déplacements, des rythmes émergent, des voix. On sent qu’une ébullition se prépare. Soudain, la danse émerge en pleine lumière, dix personnes (six hommes et quatre femmes) se lancent dans une farandole aussi survoltée que virevoltante. Comment ne pas penser immédiatement à BiT de Maguy Marin et à D’Après une histoire vraie,  de Christian Rizzo, donnée d’ailleurs à DañsFabrik deux jours plus tôt ?

Donc inspirée du folklore Badke revendique clairement ses racines. Son nom est, en effet, l’inversion du nom d’une danse folklorique palestinienne, pratiquée lors des fêtes et des mariages Dabke. Mais il existe aussi une Dabke académique qui sillonne le monde et représente les ambitions nationales palestiniennes.

Ici, ce serait plutôt une re-trouvaille de cette danse – que l’on retrouve aussi au Liban, en Syrie, en Irak et n’est pas sans accointance avec la Kibbutz Dance Company des anciens temps dont la danse folkorique - puisqu’elle intégre des éléments d’autres danses tel la capoeira, le hip-hop, l’acrobatie.

La musique de Naser Al-Faris, mise en boucle par Sam Serruys, durant la petite heure que dure le spectacle est aussi entraînante que lancinante, comme toute musique populaire.

L’énergie des danseurs est extraordinaire, la force du collectif est intense. La danse, plutôt démonstrative et performante, avec ses sauts, ses rondes enlevées, ses sarabandes au rythme échevelé, ses frappes endiablées, et ses bras en l’air qui s’agitent, qui emportent une immédiate adhésion du public.

On est alors un peu troublé. Que nous raconte Badke avec cette fête des corps virtuoses ? Pourquoi ne peut-on s’empêcher de faire immédiatement un parallèle, quant au dynamisme, aux corps galvanisés des danseurs, avec la danse israélienne, tout aussi vigoureuse ?

Mais soudain, la lumière s’éteint, on entend des cris, la musique s’arrête d’un coup. L’angoisse monte d’un cran. Les danseurs se figent alors sur le plateau, comme si la vie réelle rattrapait d’un coup cette fête étourdissante. Et puis, tout ça reprend, avec la même intensité qu’avant. N’empêche. Quelque chose s’est passé et plus rien, sur le plateau, ne peut repartir tout à fait pareil. La menace rôde. Que tout cela soit détruit brusquement. Dans la danse, malgré les mêmes figures virtuoses reprises inlassablement, une faille s’est glissée. Les individualités ressortent parfois, s’isolent, comme on fait un pas de côté. Le quotidien s’est immiscé dans cette joie collective qui pour autant ne cède pas, mais continue, continue, aussi forte et combative, aussi jubilatoire, aussi courageuse qu’avant.

Inutile de préciser qu’à DañsFabrik, ils ont créé l’événement. Les Bretons savent que la danse est parfois le dernier bastion de résistance d’un peuple.

Ce spectacle a été élaboré dans le cadre d’une collaboration entre les Ballets C de la B, le KVS et l’A.M. Qattan Foundation à Ramallah qui se sont associés pour former de jeunes danseurs et comédiens palestiniens, organiser des ateliers et mettre en place des productions. C’est dans ce cadre que la dramaturge Hildegard De Vuyst et les danseurs et chorégraphes Koen Augustijnen et Rosalba Torres Guerrero ont monté ce Badke, décidément remarquable.

Agnès Izrine

26 février 2015, Festival DañsFabrik, Le Quartz, Brest

Tournée :
Le 8 avril 2015 : Pôle Sud – Strasbourg
Les 10 et 11 avril 2015 : CC de Grote Post – Oostende, Belgique
Le 14 avril 2015 : Centre Culturel Agora – Boulazac
Du 17 au 18 avril 2015 : Centquatre – Paris

Distribution :

Conception : Koen Augustijnen, Rosalba Torres Guerrero et Hildegard De Vuyst
En collaboration et interprété par : Fadi Zmorrod, Ashtar Muallem, Farah Saleh, Yazan Eweidat, Salma Ataya, Ata Khatab/Ayman Safieh, Samaa Wakim, Mohammad Samahneh, Samer Samahneh, Maali Maali et Samaa Wakim
Assistante à la mise en scène : Zina Zarour
Musique : Naser Al-Faris
Arrangements : Sam Serruys 
Costumes : Britt Angé
Lumières : Ralf Nonn 
Régisseur son : Steven Lorie

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