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« Paysage inconnu » : Josef Nadj au festival Mimos

Josef Nadj est un dessinateur et jazzman qui chorégraphie son geste tel un oiseau aux aguets. Croire connaître le paysage qui l’entoure pourrait lui être fatal. Mieux vaut le considérer comme inconnu...

La cosmogonie de ce Paysage inconnu est placée sous le regard d’un art premier réinventé, sous forme de visages. Ronds comme une planète et mystérieux comme des masques, ils surgissent du fond des temps: La danse de Nadj peut prendre la forme d’un dessin.

Depuis les temps de Comedia Tempio et autres chef-d’œuvres du directeur du CCN d’Orléans, ses personnages ressemblent à des pantins kafkaïens, tendance burlesque, en prise avec un monde absurde. Il arrive qu’ils n’ont pas de têtes (ce qui, chez Nadj, est loin de les rendre acéphales).

Dans la vie, chaque personne que l’on rencontre est un paysage à aborder par son relief le plus immédiatement parlant, le faciès. Aussi, Nadj et Fatjo cachent les leurs sous un bout de collant, ce qui les rend insondables telles des têtes d’oiseaux. À un moment, Nadj se couche sur le dos, courbé comme dans son film Dernier paysage, où on le voit en plein bain d’argile.

 

Galerie photo de Thomas Hahn

 

 

Quand il n’évolue pas torse nu, notre Hongrois de Serbie ne jure que par une seule tenue de scène, le costume de ville noir. Dans ses créations, ce vêtement produit un effet d’abstraction permettant le passage vers un état autre. Mais on comprend ici que Nadj ne tient pas le discours habituel sur la bête noire, enfouie et refoulée. Au contraire, il part à la recherche d’une animalité plus douce, désirée mais inconnue.

Le rapprochement avec l’état originel permet de travailler les états d’âme dans une clarté et pureté autrement hors de portée. Pas de mimesis, mais un changement de perspective. « Nous nous imaginons en arbres ou en corps pétrifiées » dit-il pour décrire leurs propres paysages intérieurs.

Drôlement souples dans leur raideur, habiles dans leur gaucherie apparente, Nadj et Fatjo semblent ne faire qu’un seul corps, ou bien une multitude, un essaim. Ils n’incarnent plus des êtres mais des états, aux changements imprévisibles entre alerte, tendresse, peur ou agressivité.

Pour passer de l’esprit au corps, le geste doit affronter la musique, lui résister, la dompter. Gongs, batterie et autres accompagnent les deux chercheurs comme la pluie et le beau temps, inévitable partenaire et adversaire. Quand Nadj et Fatjo tirent une vieille baignoire, le bruit strident déchire le freejazz d’Akosh A. et Gildas Etevenard de l’intérieur.

Paysage inconnu est le meilleur Nadj depuis longtemps, d’une inspiration fascinante et parfaite autant sur la forme chorégraphique que dans le dialogue et le partage de l’espace avec les musiciens. Ce pas de deux de mime est un digne successeur à Petit psaume du matin, son duo avec Dominique Mercy créé en 2001.

 

Les Corbeaux de Josef Nadj

 

 

Mimos nous a aussi permis de découvrir trente-cinq de ses dessins, sous le titre Les Corbeaux: « Je m’imagine en corbeau pour dessiner à travers leur regard, leur ressenti, ce qu’ils captent au moment de l’atterrissage. Pour en avoir une idée, je me suis jeté vers le sol. » Il se souvient aussi d’avoir dansé, au Japon, en compagnie d’un corbeau qui s’était posé à côté de lui: « Un moment extraordinaire ! » Nadj lui-même s’est posé à Périgueux pour un moment hors du temps, avant de débarquer au Cent quatre, en septembre.

 

Thomas Hahn

 

 

Paysage inconnu

Création française le 29 juillet au festival Mimos, Périgueux

Chorégraphie et scénographie : Josef Nadj

Danse : Josef Nadj et Ivan Fatjo

Création musicale et interprétation : Akosh S., Gildas Etevenard

 

Tournée :

 

17 au 25 septembre 2014 (relâche le 21 sept) : Cent quatre (dans le cadre de Temps d'Images) - Paris (France)

2 au 4 octobre 2014 : Théâtre d'Orléans - Scène nationale - Orléans (France)

Entre le 27 octobre et le 16 novembre 2014 : Festival Internacional de danza Contemporanea Onésimo Gonzales - Guadaljara (Mexique)

1er décembre 2014 : Festival Interférences, Cluj (Roumanie)

5 et 6 décembre 2014 : Opéra de Dijon (France)

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