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Danielle Gabou : "Transe"

 

Sur le papier, les ingrédients semblaient appétissants, mais périlleux : un solo, exercice sur le fil par excellence, envoûtement lorsqu’il est réussi, long tunnel d’ennui en cas d’échec ; un documentaire de Jean Rouch, Mammy Water, projeté en arrière-plan, autre combinaison à risque tant l’alliance des images et de la danse a produit à part égale de ratages et de chefs-d’œuvre ; enfin un thème, directement inspiré de ce long métrage : celui de l’identité africaine, aussi riche d’interrogations que de clichés.

Autant de craintes balayées d’emblée dès l’entrée en scène de Danielle Gabou. Athlétique, mystérieuse, elle donne à sa présence une force magnétique qui, non seulement, réussit à rivaliser avec le film de Jean Rouch, mais joue avec celui-ci dans un véritable duo où se télescopent passé et présent, Afrique et Occident, univers liquide – le film est consacré à la déesse de la mer – et ancrage dans la solidité du sol. La danseuse est tour à tour cette Mammy Water dont on craint la colère et ces pêcheurs allant affronter la déesse.

 

Elle est surtout cet éternel féminin dont le corps, qui plie mais ne rompt pas, se métamorphose à loisir. Il faut rendre grâce au chorégraphe, Julien Ficely, d’avoir dessiné une gestuelle qui fasse à ce point corps avec la mer, au point de brouiller presque la perception du spectateur qui ne sait plus s’il est dans le film ou sur la scène. Et il faut saluer la performance de son interprète, qui semble réinventer chacun de ses gestes, transformant son tête à tête avec un patrimoine ethnographique en leçon de féminité universelle.

Isabelle Calabre

Théâtre national de Chaillot, Paris.

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